samedi 30 janvier 2021

13ème Congrès du PCVN - Place des questions de défense dans le rapport du secrétaire général du Parti 26/01/2021)

Le 26 janvier 2021, le treizième Congrès national du Parti communiste vietnamien (PCVN) s’est ouvert solennellement à Hà Nội, avec la participation de 1 587 délégués représentant quelque 5 millions de membres du parti unique. Un chiffre en hausse par rapport au précédent congrès, qui avait réuni du 20 au 28 janvier 2016 1 510 délégués (dont 125 militaires), représentant 4,5 millions de membres du Parti. Ceux-ci valideront les longs travaux de sélection des membres des instances dirigeantes du Parti, au travers de l’élection d’un nouveau Comité central – de 200 membres (180 titulaires et 20 suppléants), tout comme en 2016 – qui élira en fin de processus son nouveau secrétaire général et sa « garde rapprochée » (bureau politique, secrétariat).

Le secrétaire général du Parti – et chef de l’Etat depuis plus de deux ans – Nguyễn Phú Trọng a présenté aux participants le rapport d’activité du Comité central pour les cinq années écoulées. Malgré ses 76 ans et une année 2019 marquée par la maladie, le numéro 1 du pays a recouvré la santé de manière très visible, comme en ont témoigné ses fréquentes mises en valeur par les médias nationaux durant l’année écoulée. L’on aura juste noté son absence à l’incontournable cérémonie de recueillement des caciques du Parti devant le mausolée d’Hồ Chí Minh, le 25 janvier. 

Dans un discours d’une heure et quart, debout face à son auditoire et d’une voix assurée, il a couvert tous les volets de d’action du Parti dans la vie du pays durant le quinquennat écoulé et dépeint les ambitions assignées à la direction du Parti – et donc aux dirigeants du pays – jusqu’à l’horizon 2050. Suivant une dialectique bien épouvée, il a décrit un monde instable et incertain (mais dans lequel il s’est bien gardé de citer la Chine), dans lequel le Viêt Nam réussit cependant à poursuivre son développement économique, mais a encore beaucoup de chemin à parcourir pour atteindre l’objectif futur qui lui est assigné (accéder au statut de pays développé à l’horizon 2045), chemin qui ne peut être parcouru que sous la direction de dirigeants éclairés, fidèles à la doctrine du Parti, exemplaires en tous points, impitoyables face à la corruption, et proches de ce peuple dont ils sont censés être la quintessence.


Si le volet consacré aux aspects militaires a été relativement court, l’on note que M. Trọng aura employé dans son allocution plus de trente fois le terme « défense/protection » (bảo vệ), terme qu’il a associé pour un tiers des cas à l’« édification/construction » (xây dựng và bảo vệ). Ce bigramme apparaît de longue date dans les discours de tous les hauts dirigeants du pays, et rappelle que tout Vietnamien se voit confier une mission sacrée (Nghĩa vụ thiêng liêng) qui est de contribuer à l’édification et/ou à la défense de la Patrie. Une mission qui est gravée dans la Constitution (art. 45 : Bảo vệ Tổ quốc là nghĩa vụ thiêng liêng và quyền cao quý của công dân - « Défendre la Patrie est le devoir sacré et le noble droit des citoyens »). 

Abordant une échéance plus proche, celle de la fin de la décennie 2020, le secrétaire général du PCVN a assigné plusieurs axes d’efforts pour garantir au pays un cadre stable, propice à la poursuite du développement de l’économie nationale :

  • développer les capacités de veille stratégique afin d’être capable de détecter au plus loin et au plus tôt toute menace contre l’intégrité territoriale mais aussi la stabilité régionale. 
  • protéger fermement l'indépendance, la souveraineté, l'unité du pays et son intégrité territoriale ; 
  • garantir la sécurité nationale, l'ordre social et la sécurité (mission qui sous-entend la défense du régime, tâche première des forces de défense et de sécurité, dont les membres sont par définition absolument fidèles au Parti).

L’armée – mais aussi les forces de police – se voient assignées l’impératif de poursuivre leur modernisation, tant sur le plan de la rationnalisation des structures que sur celui du renouvellement des équipements, tout en conservant leur ancrage au sein de ce peuple dont elles sont l’émanation. Avec comme objectif d’être une armée « moderne » en 2030, l’on peut escompter que le processus d’acquisition de nouveaux matériels va se poursuivre (efforts placés sur l’armée de terre, avec la poursuite de la modernisation du corps de bataille, et sur l’armée de l’air, qui pourrait recevoir dès 2021 ses premiers Yak-130 en cours de construction en Russie). Cette modernisation des équipements majeurs, essentielle pour faire face à une menace extérieure puissante, s’accompagnera du renouvellement des équipements des combattants impliqués dans la sécurité du territoire et de la société (comme on peut le voir avec le foisonnement de nouvelles tenues de combat mais aussi avec la production d’armement individuel moderne dans les usines nationales).

Au bilan, ce volet défense du rapport du secrétaire général du PCVN est resté sobre, à l’image de l’action de l’armée dans la vie du pays, solide et au contact des populations, comme l’actualité des deux dernières années l’a démontré. Une situation qui ne variera pas dans le quinquennat qui s’ouvre, sous la houlette d’une nouvelle équipe dirigeante dont les enjeux principaux seront de poursuivre le processus de modernisation, de rester vigilante mais forcément dans une posture de réaction face au jeu des deux grandes puissances du Pacifique - Chine et Etats-Unis - à ses approches immédiates et jusque dans ses eaux territoriales revendiquées en mer « de l’Est », et enfin de relancer la diversification de ses relations internationales, qui a connu un net coup de frein sous la direction du général Ngô Xuân Lịch. Un objectif dont la réalisation dépendra de la nomination d'un ministre de la défense au profil différent de celui du général Lịch.


samedi 23 janvier 2021

Les généraux Nguyễn Tân Cương et Võ Minh Lương élevés au rang de généraux de corps d'armée (22/01/2021)

A trois jours de l’ouverture du treizième Congrès national du Parti communiste vietnamien (PCVN), le président (et secrétaire général du Parti) Nguyễn Phú Trọng a élevé au rang de généraux de corps d’armée les généraux de division Nguyễn Tân Cương et Võ Minh Lương.

Ces promotions, que nous annoncions dans de précédents articles, sont logiques.

Le général Cương est un très proche du général d’armée Ngô Xuân Lịch, ministre de la défense (les deux hommes sont nés dans le même district de la province de Hà Nam, dans le Nord) ainsi que du général de corps d’armée Phan Văn Giang, chef de l’état-major général des armées (CEMGA). Il lui a en effet succédé à la tête de la Division 312 en 2008, puis du 1er Corps d’armée en 2011. C’est tout logiquement qu’il a rejoint à nouveau ce dernier en novembre 2018 (nomination au poste d’adjoint au CEMGA, chargé notamment de l'entraînement des forces).

Vice-ministre de la défense depuis janvier 2020, il succèdera avant l’été au général Giang à la tête de l’état-major général des armées. Son jeune âge (55 ans le 16 février), son parcours professionnel mais aussi sa progression dans les instances du PCVN lui confèrent dès à présent un fort potentiel pour être un candidat de choix dans cinq ans pour accéder au poste de ministre de la défense.

Le général Võ Minh Lương affiche un profil différent. Plus âgé (57 ans), il a effectué la majeure partie de sa carrière dans le sud du pays, au sein de la grande 7e Région militaire, dont l’état-major est à Hồ Chí Minh-Ville. Il s’inscrit dans une lignée militaire, avec son père (désormais âgé de 95 ans) qui a lui aussi commandé la 7e RM 25 ans plus tôt (de 1984 à 1994). Le général Lương est surtout le représentant du Sud au sein du collège des vice-ministres de la défense. 

Ces promotions sont les dernières touches préalables à l’ouverture du Congrès du Parti. Une dernière étape devrait intervenir à courte échéance : la promotion du général Giang au rang de général d’armée, ce qui entérinera sa prochaine succession au général Lịch, dont l'âge ne lui permet pas de briguer un nouveau mandat.

Le général Ngô Xuân Lịch félicitant les généraux Cương (à gauche) et Lương (à droite).


dimanche 17 janvier 2021

Le Premier ministre laotien Thongloun Sisoulith élu à la tête du Parti populaire révolutionnaire lao (15/01/2021)

Du 13 au 15 janvier 2021, le Parti populaire révolutionnaire lao (PPRL), parti-frère du Parti communiste vietnamien (PCVN), a organisé son onzième Congrès national. Se déroulant traditionnellement avant le Congrès national du PCVN, fixé du 25 janvier au 02 février, il a les mêmes buts : dresser le bilan d’une la mandature qui s’achève (2016-2021) et fixer les orientations pour le pays pour le prochain quinquennat, renouveler une génération de hauts dirigeants du parti unique, et désigner les postes sommitaux du Parti - et donc de l’Etat, avant que des élections législatives permettent aux électeur d’entériner démocratiquement ces choix prix dans les instances feutrées du Parti. 

768 délégués (dont 116 femmes), représentant les quelque 349 000 membres du PPRL (sur près de 7 millions d'habitants), se sont réunis en conclave au Centre national de la convention à Vientiane, sous le regard immuable de Kaysone Phomvihane, premier secrétaire général du PPRL, et de celui tout aussi fixe de Marx et Lénine.

Au terme des travaux, un nouveau Comité central a été investi le 15 janvier. Il comprend 71 titulaires (dont 12 femmes) - deux de plus qu’en 2016 - et 10 suppléants (2 femmes). Ce comité central a élu un bureau politique de 13 membres (deux de plus que le précédent comité central) ainsi qu’une commission centrale de contrôle de 7 membres. 

Le nouveau bureau politique ne comprend pas le secrétaire général du 10e Comité central et président sortant, Bounnhang Vorachit qui achève donc à 83 ans son parcours à la tête du Parti et de l’Etat

Le Premier ministre Thongloun Sisoulith (75 ans) a été élu nouveau secrétaire général du Parti. Comme son prédécesseur à la tête du Parti, il devrait être élu président de la république à l’issue des élections législatives du 21 février.


Le nouveau secrétaire général du PPRL a aussitôt été félicité par son homologue vietnamien, Nguyễn Phú Trọng, qui ouvrait dans le même temps le quinzième et dernier plénum du Comité central du PCVN, dont les travaux (15 au 18 janvier) doivent finir de sélectionner les candidats aux postes suprêmes du Parti et de l’Etat (secrétaire général, président de la république, premier ministre et président(e) de l’assemblée nationale). 

Alors que M. Trọng, qui a largement dépassé sa limite d’âge en exercice et termine son second mandat à la tête du PCVN, le premier ministre Nguyễn Xuân Phúc pourrait, à l’image de Thongloun Sisoulith, accéder lui aussi au poste de numéro 1 du régime vietnamien. A moins que son succès dans la gestion du pays, notamment dans ce contexte de crise sanitaire, ne suffise pas à dissuader les délégués de se prononcer en faveur d’un idéologue, à l’image du secrétaire permanent du Comité central du Parti Trần Quốc Vượng.

Enfin, l’on notera la progression dans la hiérarchie du PPRL du général d’armée Chansamone Chanyalath, actuel ministre de la défense, qui passe du treizième au sixième rang, et qui succède à Chansy Phosikham au poste de président de la Commission de contrôle du Parti. Son successeur à la tête des armées lao devrait logiquement être le général de corps d’armée Souvone Leuangbounmy, actuel chef de l’état-major général des armées et vice-ministre de la défense, qui est le second militaire le plus haut placé dans la hiérarchie du Comité central du Parti (même s’il rétrograde de la 22à la 23place), devant le GCA Thongloy Silivong, lui aussi vice-ministre de la défense et chef du puissant Département général politique du ministère de la défense (27e place, lui aussi en perte d’un rang par rapport à 2016).

L'impact de cette relève de générations à la tête du parti unique devrait se prolonger par des ajustements à  la tête des instances dirigeantes de l'Etat. Les élections législatives confirmeront cette nouvelle hiérarchie pour les cinq prochaines années. 

jeudi 14 janvier 2021

13ème Dialogue politique de défense entre le Viêt Nam et l'Inde (12/01/2021)

Concentration masquée à New Delhi, quand les esprits semblent tournés vers un autre horizon à Hà Nội. 

L’année 2021, qui s’ouvre sous le signe de la distanciation des relations internationales, n’empêche pas le ministère vietnamien de la défense de maintenir le contact avec ses principaux partenaires, suivant un mode visioconférence qu’il maîtrise très bien depuis son année de présidence de l’ASEAN.

Le 12 janvier, le général de corps d’armée Nguyễn Chí Vịnh, toujours dans ses fonctions de vice-ministre de la défense, chargé des relations internationales, a coprésidé la treizième édition du Dialogue politique de défense avec l’Inde, avec depuis New Delhi M. Ajay Kumar, secrétaire à la défense.

Dans une année marquée par le repli forcé des pays à l’intérieur de leurs frontières, plus d’un an s’est écoulé depuis le précédent Dialogue entre ces deux autorités, le 03 octobre 2019 à Hồ Chí Minh-Ville. Le lien entre les deux partenaires demeure solide même si la distance et la non maîtrise d’une langue de communication commune est visiblement un obstacle naturel difficile à franchir, surtout lors d’une visioconférence. La présence autour de la table de réunion de grands commandeurs maîtrisant certes leurs dossiers mais figés devant la glace que représente cet exercice de style difficile n’a pas dû fluidifier les échanges. Une situation encore plus complexe pour le général d’armée Ngô Xuân Lịch, ministre de la défense, dont l’échange avec son homologue indien le 27 novembre 2020 n’a pas dû aller très avant dans les propositions ou les bilans.

L’on gardera cependant à l’esprit l’excellente relation qui lie les deux armées, et la volonté indienne de montrer sa présence en Asie du sud-est et en mer de Chine méridionale. C’est ainsi que, du 24 au 26 décembre 2020, la corvette INS Kiltan, bâtiment de la classe Kamorta spécialisé dans la lutte anti-sous-marine (gabarit : 109 mètres de long pour 14 de large, déplacement de 3 300 tonnes, équipage de 190 marins dont 10 officiers), a fait escale au port de Nhà Rồng à Hồ Chí Minh-Ville. En cette année quasi blanche sur le plan des escales, que les autorités vietnamiennes espéraient pourtant très nombreuses, il s’est agi de la quatrième et dernière escale de l’année dans le pays, la première à Hồ Chí Minh-Ville et la seule d’un bâtiment indien.

Le bâtiment était engagé dans un déploiement à vocation humanitaire régional (Mission SAGAR III (*)) et avait livré 15 tonnes de matériel pour venir en aide aux populations victimes des catastrophes naturelles qui ont durement frappé le Centre du pays depuis l’été. A son départ, le bâtiment a participé à un Passex avec le bâtiment de lutte anti-sous-marine 13, appartenant à la 2e Région maritime.

 

(*) SAGAR : Security and Growth for All in the RegionDu 29 décembre 2020 au 01 janvier 2021, le bâtiment a délivré 15 autres tonnes de matériel au profit des populations cambodgiennes lors d’une escale à Sihanoukville.

L'important est de donner, mais aussi de bien faire savoir qui est le généreux donateur!

Deux autres missions à vocation humanitaire ont été conduites en 2020, sur décision du Premier ministre Narendra Modi. La mission SAGAR I avait ciblé, du 10 mai au 28 juin, les Maldives, l’île Maurice, Madagascar, les Comores and les Seychelles (bâtiment de transport amphibie INS Kesari). La mission SAGAR II, conduite par le bâtiment de transport amphibie INS Airavat en novembre, était orientée vers les pays de la corne de l’Afrique (Soudan, Soudan du sud, Djibouti, Erythrée). Ces missions visaient à montrer que l'Inde, puissance riveraine de l'océan Indien, a la capacité et la volonté d'y jouer un rôle dans l'assistance humanitaire (et par-là y renforcer son influence).

vendredi 8 janvier 2021

Préparatifs du 13ème Congrès du PCVN - revue du dispositif sécuritaire (08/01/2021)

A l'heure où les Etats-Unis sont encore sous le choc de l'assaut du Capitole par des sympathisants du président Trump, le risque de troubles sécuritaires lors du Congrès national du Parti communiste vietnamien, qui s'ouvrira le 25 janvier, est infime.

Les forces de sécurité, par cette répétition de défilé, ont clairement affirmé être sur le pied de guerre pour garantir la sécurité des travaux des délégués qui seront amenés à élire le nouveau Comité central du Parti et les plus hauts dirigeants du pays pour les cinq prochaines années.

Une belle revue des troupes et des équipements des forces de sécurité qui seront engagées pour protéger cet événement très attendu.