lundi 7 juin 2021

Un second patrouilleur cédé par les Américains à la police maritime vietnamienne prend la route de la mer "de l'Est" (01/06/2021)

Près de trois ans après le transfert à la police maritime vietnamienne d’un premier patrouilleur de haute mer des garde-côtes américains retiré du service actif, un second bâtiment de la classe Hamilton a quitté Seattle (Etat de Washington) le 1er juin 2021 à destination des eaux vietnamiennes.  

L’ex-USCGC John Midgett (WHEC-726), qui avait été désarmé en 2020 après 40 ans de service, arbore désormais les couleurs vietnamiennes et le numéro de coque CSB 8021. Le bâtiment au gabarit imposant (115 mètres de long pour 13 mètres de large et un déplacement de 3 250 tonnes) rejoindra à la fin de l’année la 3e Région de police maritime au terme d’un transit de plusieurs mois, avec une première étape à Hawaii. 

Le bâtiment est mis en oeuvre par 

Il rejoindra à Bà Rịa Vũng Tàu l’ex-USCG Morgenthau (WHEC-722) qui y opère depuis le 16 décembre 2017 sous l’immatriculation CSB-8020. Tous deux sont désormais les plus grands bâtiments de la police maritime vietnamienne. Malgré leur grand âge, ils accroîtront nettement la capacité opérationnelle de cette composante dans le sud de la mer de Chine méridionale (mer « de l’Est ») et notamment jusque dans l’archipel des Spratley. 



vendredi 4 juin 2021

Le GCA Nguyễn Tân Cương nommé chef de l'état-major général des armées (31/05/2021)

Le 31 mai 2021, le général de corps d’armée Nguyễn Tân Cương, plus fort haut potentiel des vice-ministres de la défense et de facto chef de l’état-major général des armées (CEMGA) depuis l’élection du GCA Phan Văn Giang au poste de ministre de la défense (08 avril 2021), a été nommé par le président Nguyễn Xuân Phúc à ce poste clé des armées vietnamiennes. Il s’est vu remettre sa charge des mains du chef de l’Etat, le 03 juin au palais présidentiel (ci-dessous).

Cette nomination est logique, comme nous le soulignions déjà.

Le général Cương est en effet un très proche du général d’armée Ngô Xuân Lịch, ex-ministre de la défense (les deux hommes sont nés dans le même district de la province de Hà Nam, dans le Nord) ainsi que du général Giang, désormais ministre de la défense et ex-chef de l’état-major général des armées (CEMGA, mai 2016 - mai 2021). Il lui a en effet succédé à la tête de la Division 312 en 2008, puis du 1er Corps d’armée en 2011. C’est tout logiquement qu’il a rejoint à nouveau ce dernier en novembre 2018 (nomination au poste d’adjoint au CEMGA, chargé notamment de l’entraînement des forces).

Vice-ministre de la défense depuis janvier 2020, il continue donc de marcher dans les pas du général Giang en accédant à la tête de l’état-major général des armées. Son jeune âge, son parcours professionnel mais aussi sa progression dans les instances du PCVN (il est membre titulaire du Comité central du Parti depuis janvier 2011) et de l’Etat (*) lui confèrent dès à présent un fort potentiel être un candidat de choix dans cinq ans pour accéder au poste de ministre de la défense.

Cette nomination met un terme à la relève du haut état-major vietnamien. Les ajustements, promotions, nominations qui interviendront dans les quatre années qui s’ouvrent permettront de voir se dessiner les profils de futurs titulaires des postes sommitaux pour le mandat 2026-2031, une échéance encore lointaine par rapport aux objectifs immédiats de la nouvelle équipe : vaincre la pandémie de COVID-19 et poursuivre la modernisation de l’armée populaire vietnamienne, avec en toile de fond les rivalités sino-occidentales en mers de Chine.


(*) Le 23 mai 2021, le général Cương s’est présenté aux élections législatives dans la province de Bình Dương (Sud). Il rejoint en ce sens le parcours du général Ngô Xuân Lịch qui, quoiqu’originaire du Nord, avait obtenu son premier poste de député dans le Sud (province de Bình Phước).


mercredi 5 mai 2021

Réunion entre états-majors des armées vietnamien et français (05/05/2021)

Alors que la pandémie de COVID-19 connaît quelques sursauts qui placent à nouveau sur le grill la task force gouvernementale chargée de la lutte contre ce fléau, et donc sa composante militaire, la nouvelle équipe dirigeante du ministère vietnamien de la défense ne perd pas de vue les enjeux que représentent la densification des relations de l’armée populaire vietnamienne avec ses partenaires internationaux.

Après une longue séquence chinoise du 23 au 27 avril 2021, marquée par la réception du ministre de la défense, le général Wei Fenghe, puis la pause relative aux commémorations de la « libération » de Saigon (30 avril 1975), la diplomatie de défense vietnamienne a mis le cap à l’ouest en ce 05 mai, le temps d’une visioconférence consacrée à la coopération avec les armées françaises. Près de deux ans après la tenue à Paris du second Dialogue franco-vietnamien sur les questions stratégiques et la coopération de défense (DQSCD - Đối thoại Chiến lược và Hợp tác quốc phòng Việt-Pháp), du 1er au 04 juillet 2019, un groupe de travail consacré à la coopération militaire (Nhóm làm việc về hợp tác quốc phòng Việt-Pháp) s’est réuni depuis Hà Nội et Paris.

Les travaux, co-présidés par le général de division Vũ Chiến Thắng (ci-dessus), directeur du Département des relations extérieures du ministère vietnamien de la défense, et le général de brigade Eric Peltier, chef de la division de coopération bilatérale sud de l’état-major des armées françaises, ont permis de dresser un bilan de deux années d’activités très perturbées sur le plan des interactions directes par les effets de la pandémie de COVID-19, mais dont la dynamique n’a pas été interrompue. Ainsi, le général Thắng s’est félicité de la poursuite des activités de formation délivrées par les armées françaises au profit de jeunes officiers vietnamiens, de membres du service de santé des armées vietnamiennes et des militaires qui se préparent collectivement ou individuellement à rejoindre des opérations de maintien de la paix sous l’égide des Nations unies.

Ambiance studieuse.

Si la presse ne s’est logiquement pas fait l’écho de la densité de ces activités, le chef de la délégation vietnamienne a tenu à placer l’année 2021 sous le signe du trentième anniversaire de l’institutionnalisation de relations bilatérales de défense entre Paris et Hà Nội, en 1991. A l’image de cette communication rapide sur cette réunion, ce millésime 2021 devrait donner l’occasion au ministère vietnamien de la défense de saisir toute opportunité pour jeter quelques coups d’éclairage sur ce partenariat. Un souhait légitime mais qui pourrait se heurter pour encore quelque temps au carcan imposé par la distanciation relationnelle résultant de cet effet COVID-19, qui conduit la diplomatie internationale de défense à privilégier des visioconférences par rapport aux rencontres directes.

Si le contexte sanitaire venait à s’assainir, Hà Nội devrait accueillir en fin d’année la réunion sommitale de ce 2e DQSCD, qui sera co-présidée au niveau vice-ministre de la défense et devrait donc permettre au général de corps d’armée Hoàng Xuân Chiến de prendre le relai de l’action qu’a menée pendant plus de dix ans son emblématique prédécesseur, le GCA Nguyễn Chí Vịnh.

samedi 24 avril 2021

Escale d'un destroyer japonais à Hải Phòng (20-22/04/2021)

Du 20 au 22 avril 2021, le destroyer japonais Akebono (DD-108) a fait escale à Đình Vũ, le port militaire de Hải Phòng. Le bâtiment, déployé actuellement en mer de Chine méridionale, avait eu précédemment une interaction avec le groupe école de la marine française, avant que celui-ci ne s’affiche conjointement avec deux bâtiments australiens (frégate Anzac et pétrolier ravitailleur Sirius) en mer « de l’Est ». Il avait fait escale en Malaisie puis en Indonésie et s’était plusieurs fois affiché aux côtés des deux bâtiments australiens en mer de Chine méridionale.

Le bâtiment et ses 247 marins sont commandés par le capitaine de vaisseau Hamasaki Shingo. Contexte de pandémie de COVID-19 oblige, les contacts directs avec les autorités locales ont été réduits à leur plus simple expression, mais le pacha du bâtiment a participé a une visioconférence avec les cadets de l’Ecole navale vietnamienne.

Il s’agit de la première escale nippone au Viêt Nam en 2021, et la seconde toutes nations confondues après celle menée par la frégate de surveillance française Prairial à Cam Ranh du 09 au 12 mars. 


mercredi 21 avril 2021

Transfert d'autorité à la tête du Rôle 2 vietnamien de la MINUSS (17/04/2021)

Le 17 avril 2021, l’hôpital militaire de campagne de type Rôle 2 armé par le service de santé des armées vietnamiennes à Bentiu (Soudan du sud) a changé de commandant. Lors d’une petite cérémonie officielle, organisée à huis clos en raison des mesures de distanciation liées à la pandémie de COVID-19, le colonel supérieur Nguyễn Bá Hưng, l’un des adjoints au directeur du Département des opérations de maintien de la paix, a transféré la responsabilité de cet hôpital relevant de la Mission des Nations unies au Soudan du sud (MINUSS) entre les lieutenants-colonels (docteurs) Võ Văn Hiển et Trịnh Mỹ Hòa.

Arrivé à Juba le 26 mars par C-17 australien, le LCL Hoà et la moitié de son détachement avaient dû attendre deux semaines en quatorzaine sanitaire avant de rejoindre Bentiu. Après quatre jours de passations de consignes, les deux médecins ont enfin signé le PV de transfert de responsabilité. 

Le personnel ayant mis en œuvre ce Rôle 2 durant plus de 16 mois, en raison de l’impossibilité de mener des relèves en ces temps de pandémie internationale, va donc pouvoir entamer son retour vers le Viêt Nam le 24 avril, toujours par voie aérienne militaire fournie par l’armée australienne (un C-17 doit être sur le point de récupérer à Hồ Chí Minh-Ville la seconde moitié du personnel du troisième mandat). Une nouvelle page s’ouvre pour le service de santé des armées vietnamiennes, avec ce nouveau mandat au service de populations qui voient le drapeau onusien comme une marque de salut dans leur vie d’incertitudes. Le temps des pionniers appartient déjà au passé, place à celui de la consolidation de l’image de l’armée vietnamienne au service de la paix internationale. 

samedi 17 avril 2021

L'ambassadeur du Viêt Nam en France promu commandeur de la Légion d'honneur (09/04/2021)

Le 09 avril 2021, M. Bertrand Lortholary, directeur Asie-Océanie du ministère français de l’Europe et des affaires étrangères (et ambassadeur de France à Hà Nội d’août 2016 à l’été 2019), a remis à l’ambassadeur du Viêt Nam en France, M. Nguyễn Thiệp, la cravate de commandeur de l’Ordre national de la Légion d’honneur. 

L’attribution de cette décoration prestigieuse directement au rang de commandeur au représentant du régime de Hà Nội en France, a de quoi susciter l’interrogation. Non sur l’Ordre en tant que tel, la diplomatie française faisant souvent fi de l’Histoire - contrairement à la diplomatie vietnamienne - et de la nature du régime représenté par l’ambassadeur Thiệp, mais sur le rang dans la hiérarchie de la décoration.

L’on rappellera que M. Lortholary avait été honoré après son retour en France par l’attribution de la médaille de l’amitié de l’Etat vietnamien. Elle lui avait justement été remise par l'ambassadeur Thiệp, lors de la fête nationale vietnamienne. Une décoration importante certes mais taillée sur mesure pour saluer les hauts responsables (essentiellement les ambassadeurs, pour ce qui relève de la diplomatie) ayant animé la relation bilatérale. L’ambassadeur des Etats-Unis Daniel Kritenbrink, qui termine son mandat, l’a au demeurant reçue ce même 09 avril, des mains du vice-ministre des affaires étrangères Nguyễn Quốc Dũng, au nom du président Nguyễn Xuân Phúc (et non plusieurs mois après qu’il aura quitté le pays. Un fossé existe entre cette distinction et le rang de commandeur d’un Ordre aussi prestigieux que la Légion d'honneur, qui reconnaît des services éminents rendus à la nation française. Sans nier la bonne dynamique de la relation franco-vietnamienne, des observateurs pourraient se demander si ce geste n’est pas un pari sur et pour le futur de la relation bilatérale. Avec l’Asie qui cristallise de plus en plus les ambitions des nations occidentales (et toujours de la Chine), qui se traduisent par une recrudescence actuelle de la publication de stratégies indopacifiques - notamment par la France – tous les atouts peuvent peser pour gagner les faveurs des dirigeants vietnamiens. Et une décoration peut être une goutte d’huile facile à verser dans le grand jeu de la compétition internationale, surtout à un moment où le PCVN et les hautes instances de l’Etat vietnamien viennent de renouveler leurs plus hauts dirigeants pour cinq ans. 

La non médiatisation de cette cérémonie, tout au moins du côté français, pourrait aussi avoir visé à ne pas froisser le monde toujours légitimement sensible des anciens combattants, en cette période qui coïncide avec le souvenir toujours vivant du milieu de la bataille de Điện Biên Phủ, il y a 67 ans. 

L’avenir dira si cette diplomatie de la décoration portera des fruits. En tout état de cause, reconnaître à un tel niveau les services de l’ambassadeur Thiệp donne le "la" de la reconnaissance dont devrait bénéficier son successeur. En plaçant la barre aussi haut, la diplomatie française pourrait se lier les mains : il lui sera en effet difficile de ne pas reconnaître les services que le successeur de l’ambassadeur Thiệp rendra durant son mandat, au risque de lui faire perdre la face, ce qui n’est pas acceptable. Un pari osé, qui profite en tout état de cause actuellement à la diplomatie vietnamienne, si l’on en juge la forte médiatisation dans la presse vietnamienne de cette remise de cravate. Une cravate qui, espérons-le, n’étranglera pas les ambitions françaises sur tous les champs de la relation bilatérale.

jeudi 15 avril 2021

Premiers contacts internationaux du GCA Phan Văn Giang: pays-frères d'abord! (14/04/2021)

Il n’aura pas fallu attendre longtemps pour que le général de corps d’armée Phan Văn Giang, nouveau ministre vietnamien de la défense, se positionne dans le domaine des relations internationales militaires. Histoire, politique et diplomatie de défense étant indissociables dans les relations extérieures vietnamiennes, c’est tout naturellement que le général Giang a reçu ce 14 avril 2021 les ambassadeurs des quatre emblématiques partenaires de l’armée populaire vietnamienne.

Honneur aux « pays-frères », il a reçu successivement le matin, sous le regard toujours serein d’Hồ Chí Minh :

  • M. Sengphet Houngbuongnuang, l’ambassadeur du Laos, pays lié au Viêt Nam par le traité d’amitié et de coopération du 18 juillet 1977, qui soude la « relation spéciale » forgée dans les guerres de libération et qui n’a jamais été démentie. Une relation que le général Giang s’est naturellement engagé à continuer d’approfondir, à l’image de tous les dirigeants vietnamiens ;
  • puis M. Chay Navuth, l’ambassadeur du Cambodge, dont l’histoire et la société restent marqués par l’influence vietnamienne ; 
  • et enfin M. Viktor Vnukov, l’ambassadeur de Russie. Autant le général Giang a aisément tenu des propos de « grand frère » avec ses deux premiers visiteurs, avec des propos forcément convenus, autant l’entretien avec le représentant de Moscou a trouvé plus de profondeur, en raison de la toujours forte dépendance - ou « partenariat » en des termes moins durs pour celui qui est dans cette position d’infériorité - de l’armée vietnamienne envers l’incontournable partenaire russe. Une relation poussée jusqu’au niveau le plus honorifique, comme le président Putin vient de l’illustrer le 29 mars, en décernant l’Ordre de l’Amitié aux généraux d’armée Ngô Xuân Lịch et Lương Cường ainsi qu’aux généraux de corps d’armée Phan Văn Giang et Bế Xuân Trường pour leur contribution au resserrement des liens entre armées-« sœurs ». Une décoration en appelant une autre, le général Giang a exprimé son intention de se rendre prochainement à Moscou afin de remettre une décoration similaire à l’état-major des armées russe, au terme de cette année croisée durant laquelle Moscou et Hanoi ont célébré le 70e anniversaire de l’établissement de leurs relations diplomatiques, sans grand faste en raison de la pandémie de COVID-19. Ce déplacement pourrait intervenir à la fin de l’été, à l’occasion des Army Games(22 août au 04 septembre). 
  • Relégué en quatrième position, l’ambassadeur chinois Xiong Bo a été reçu dans l’après-midi. Après deux années marquées par une relative fraîcheur des relations bilatérales, en raison de l’activisme chinois en mer de Chine méridionale, comme cela s’était passé cinq ans auparavant dans un contexte similaire de grandes échéances politiques au Viêt Nam, l’heure devrait être à la reprise de contact « du fort au plus faible ». Le général Giang a ainsi annoncé une prochaine visite à Hà Nội du général Wei Fenghe, ministre chinois de la défense, dans une logique traditionnelle de bon voisinage nourries entre plus hauts dirigeants militaires et des Parti communistes respectifs, garants de la bonne relation entre régimes unis idéologiquement. Aucune date n’a été évoquée pour cette visite, sans doute en raison des incertitudes du calendrier diplomatique et du contexte sanitaire. La dernière visite du général Wei Fenghe à Hà Nội avait eu lieu fin mai 2019, juste en amont de l’ouverture de la session annuelle du Shangri-La Dialogue à Singapour. L’édition 2021 de cet événement phare de la diplomatie de défense en Indo-Pacifique pourrait offrir l’opportunité au dirigeant chinois de faire une halte au Viêt Nam. 

Cette première prise de contact du général Giang avec les représentants des partenaires historiques de l’armée populaire vietnamienne est logique. Il importera désormais de voir dans quel ordre le ministre de la défense recevra les représentants des autres pays partenaires du Viêt Nam. Les prétendants ne manquent pas, avec ceux de l’ASEAN - dont le Viêt Nam a assuré la présidence en 2020 – mais aussi les grandes nations de l’Indo-Pacifique (Etats-Unis, Australie, Japon) et celles qui cherchent à faire reconnaître leur statut de puissance régionale (France) voire d’acquérir une légitimité (Royaume-Uni, et jusqu’à l’Allemagne et l’Union européenne). 


mardi 13 avril 2021

Le général de corps d’armée Phan Văn Giang, nouveau ministre de la défense (08/04/2021)

Le 08 avril 2021, presque cinq ans jour pour jour après avoir été nommé vice-ministre de la défense (12 avril 2016), le général de corps d’armée Phan Văn Giang, chef de l’état-major général des armées, a été élu par les députés réunis en une onzième session de la quatorzième législature au poste de ministre de la défense. La cérémonie officielle de passage de témoin entre les ministres prenant et partant s’est déroulée le 09 avril en présence de tous les militaires membres de la Commission militaire centrale.

Sans cérémonial particulier, le général d’armée Ngô Xuân Lịch a été salué par tous ses proches collaborateurs

Entré en service en 1972, à 18 ans, à la fin de la guerre contre les Américains, Ngô Xuân Lịch a notamment combattu dans le sud-ouest (lors de la campagne Hô Chi Minh). Puis il a intégré le corps des commissaires politiques (Département général Politique du ministère de la défense), au sein duquel il a effectué toute sa carrière jusqu’au sommet de la hiérarchie. En mars 2011, il a pris la tête de ce très puissant département, accédant de fait au poste de numéro 2 du ministère, derrière le ministre (général d’armée Phùng Quang Thanh). Promu général d’armée le 5 octobre 2015, il a été élu le 9 avril 2016 ministre de la défense, bénéficiant certainement de sa proximité avec le secrétaire général du Parti communiste vietnamien Nguyễn Phú Trọng. Son principal concurrent pour ce poste prestigieux, le général d’armée Đỗ Bá Tỵ, plus ouvert aux relations avec les nations occidentales à l’image de la dynamique du premier ministre d’alors Nguyễn Tấn Dũng, a probablement fait les frais de l’éviction de ce dernier de la course au poste du numéro 1 du pays. Sans surprise pour un « commissaire politique en chef », l’action du général Lịch s’est concentrée sur la scène intérieure, hormis quelques rares déplacements à l’étranger : Chine, Russie bien sûr, proches partenaires du Viêt Nam au sein de l’ASEAN - dont il a dû animer les instances de défense en 2020 -, Washington, Tokyo, Paris mais aussi Bruxelles et ses instances de l’Union européenne, sans oublier l’incontournable voyage à La Havane malgré la pandémie de COVID-19. Homme-clé des instances dirigeantes du Parti communiste vietnamien, ce fidèle du secrétaire général Nguyễn Phú Trọng a certainement permis de maintenir une relation de respect avec l’incontournable voisin chinois, qui a continué ses provocations dans les eaux de la mer « de l’Est » revendiquées par Hà Nội. Quittant l’institution après 49 ans de service, le général Lịch laissera une empreinte de son influence jusque dans le Bureau politique du Comité central du Parti, où le général d’armée Lương Cường, son successeur en 2016 à la tête du Département général Politique, a fait son entrée en janvier, en même temps que le général Giang. Une situation inédite depuis vingt ans. 

 

Avec l’arrivée du général Giang à la tête du ministère, l’on assiste au retour d’un opérationnel au premier plan. Né en octobre 1960 dans la province de Nam Định (Nord), Phan Văn Giang s’est engagé à 18 ans comme simple combattant, durant le bref conflit contre les Chinois sur la frontière nord. Ayant connu le baptême du feu dans les combats près de Cao Bằng, il a ensuite entamé une carrière d’officier de cavalerie (scolarité à l’école des blindés de 1980 à 1983) puis effectué la quasi-totalité de sa carrière au sein du 1er Corps d’armée (état-major à Ninh Bình), qu’il a commandé de 2010 à 2011 avant d’être nommé à un poste d’adjoint au chef d’état-major général des armées. 

Son parcours s’est poursuivi, toujours dans le Nord du pays, avec la prise de commandement de la 1ère région militaire, en avril 2014. C’est tout logiquement qu’il a fait son entrée au Comité central du Parti communiste lors du 12e Congrès national (janvier 2016) et a été nommé vice-ministre de la défense (avril 2016) puis chef de l’état-major général des armées (mai 2016). Sa jeunesse (61 ans), son parcours réussi, mais aussi l’âge relativement élevé des potentiels prétendants du Département général Politique au poste de ministre, ont été autant d’atouts qui ont pesé pour son élection à la succession du général Lịch.

Si sa légitimité est incontestable (il sera élu à un poste de député lors des élections législatives du 23 mai, puis confirmé dans son poste de ministre par les députés de la nouvelle législature), il lui incombera de se démarquer de son prédécesseur sur la scène des relations internationales de défense, sur laquelle le général Lịch était peu à l’aise. Un premier test de la volonté du nouveau ministre de rechercher le contact, même en cette période de confinement forcé, devrait être le rendez-vous incontournable de l’Indo-Pacifique de la défense qu’est le Shangri-La Dialogue, organisé les 04 et 05 juin à Singapour, après une année blanche en 2020 en raison de la pandémie de COVID-19. L’on se souvient que le général Lịch ne s’était pas déplacé à cet événement en 2016, après sa prise de fonction, indiquant son manque d’aisance envers ces grands rendez-vous internationaux. Malgré l’organisation très contrainte de cette édition (moins deux jours, dans une bulle sanitaire stricte), les nations de l’Indo-Pacifique rechercheront à être représentées. Il sera difficile au nouveau ministre vietnamien de la défense de ne pas faire le court déplacement jusqu’à Singapour, et ce d’autant plus que le Viêt Nam siège encore pour huit mois au Conseil de sécurité des Nations unies et qu’il n’hésite pas à véritablement démarcher les nations occidentales pour obtenir leur appui diplomatique face à l’affirmation provocatrice de puissance chinoise en mer de Chine méridionale.

Nouveau quinquennat, nouveau chef de file, mais pas un homme nouveau : le général Giang s’inscrira dans la lignée des ministres de la défense, absolument fidèle aux directions du Parti, mobilisé sur toutes les questions relatives à la stabilité du régime, mais certainement aussi confronté au dilemme de trouver une position de « juste milieu » sans sa relation avec un voisin chinois au rapport de force très supérieur, très actif jusque dans ses eaux territoriales, en proie à un bras de fer durable avec les autres « nations de l’Indo-Pacifique », et ce tout en conservant une posture refusant toute alliance avec un pays tiers, toute base étrangère sur son territoire. 

Son successeur au poste de chef de l’état-major des armées n’est pas encore nommé. Pour autant, le général de corps d’armée Nguyễn Tân Cương présente le meilleur profil pour accéder à cette fonction. Très jeune (55 ans), ce proche du général Giang lui a déjà succédé par deux fois à la tête d’unités de tout premier plan, d’abord en 2008 à la tête de la prestigieuse Division 312 (Sư đoàn Chiến Thắng, division de La Victoire – de Điện Biên Phủ), ensuite en 2011 à celle du 1er Corps d’armée, puis l’a rejoint dans le comité des adjoints au chef de l’état-major des armées. Il est le général de corps d’armée qui présente le plus haut potentiel de progression, y compris pour succéder à nouveau, dans cinq ans, au général Giang au sommet de la pyramide des armées. Là aussi, le changement continuera de s'inscrire dans la continuité.

jeudi 8 avril 2021

Relève de générations à la tête des instances dirigeantes du Viêt Nam (31/03 au 08/04/2021)

Alors que les élections législatives ne sont prévues que le 23 mai, l’assemblée nationale, réunie en une onzième session, a procédé au renouvèlement des plus hautes autorités de l’Etat (président de la république, premier ministre, président de l’assemblée nationale) et du gouvernement. Comme nous le soulignions il y a cinq ans, le procédé peut laisser dubitatif, les élections n’étant pas encore organisées, mais il n’a que pour but d’entériner les décisions prises lors du treizième Congrès national du Parti communiste (PCVN), fin janvier. Les électeurs s’exprimeront au bilan uniquement pour confirmer ces décisions, avec comme seul véritable enjeu pour les nouveaux élus - tous députés - d’obtenir la plus forte « cote d’amour », un pourcentage de vote sur leur nom le plus proche possible des 100 %...

Ainsi, le 31 mars 2021, l’assemblée nationale a élu avec plus de 98 % des votes des députés présents M. Vương Đình Huệ pour succéder à Mme Nguyễn Thị Kim Ngân à la tête de cette instance. Âgé de 64 ans, ce Nordiste (il est né dans la province du Nghệ An) succède à une Sudiste, de surcroît la première femme qui avait jamais occupé ce poste prestigieux. 

Membre du PCVN depuis 37 ans (il a fait son entrée au Comité central en 2006 et au Bureau politique en 2011, et est secrétaire du comité du Parti de la capitale), ce docteur en économie formé en Slovaquie (où il a vécu l’explosion du bloc de l’Est à la fin des années 1980), possède comme son prédécesseur une expérience ministérielle réussie (ministre de l’économie puis vice-premier ministre). 

Après cette première nomination, les députés ont élu le 02 avril un nouveau président de la république. Après deux ans et demi de cumul de la fonction de secrétaire général du PCVN et de chef de l’Etat, Nguyễn Phú Trọng passe (enfin !) officiellement le flambeau de la fonction présidentielle à M. Nguyễn Xuân Phúc

L’ex-premier ministre (né dans le Centre du pays en 1954), qui a tenu cette fonction avec abnégation et permis au pays de se mobiliser efficacement dans les campagnes de lutte contre la pandémie de COVID-19 et contre les récentes inondations, voit son travail récompensé et ses capacités reconnues (il est élu avec près de 93 % des votes des députés). Très tourné vers l’étranger, il continuera d’incarner sur la scène internationale la volonté de Hà Nội de poursuivre son intégration dans la communauté des nations, une posture pour laquelle Nguyễn Phú Trọng, dans la lignée des secrétaires généraux du PCVN, était par essence bien moins affûté – sauf au sein du cercle très fermé des pays-frères. Si l’on assiste donc bien à un retour à une normalité pour ce qui est du découplage des fonctions secrétaire général du Parti et président de la république, l’accession d’un ex-premier ministre à la fonction présidentielle est une surprise.

Enfin, dans un registre de la surprise un peu plus marquée, un homme fort mais sans réelle expérience de la gestion des questions économiques au niveau étatique accède au poste de premier ministre (avec plus de 96 % d’approbation par les députés). M. Phạm Minh Chính, Nordiste (il est originaire de la province de Thanh Hóa) âgé de 60 ans, a effectué la grande majorité de sa carrière au sein du puissant ministère de la sécurité publique (Công An). 

Lui aussi formé au contact d’un pays du bloc de l’Est - la Roumanie, où il a été premier secrétaire à l’ambassade du Vietnam à Bucarest jusqu’en 1996, et a donc lui aussi assisté de visu à l’effondrement du régime communiste dans ce pays – il a gravi les échelons dans le sommet de la pyramide de la Công An pour accéder au rang de général de division en 2010 puis a un poste de vice-ministre. En 2011, à 50 ans, il a fait son entrée au Comité central du PCVN et a été nommé secrétaire du Parti pour la province de Quảng Ninh, où il a manifestement obtenu de bons résultats en matière de gestion du développement. Reconduit au Comité central cinq ans plus tard, il a pris en 2016 la tête de la Commission de l’organisation du Parti. Son ascension s’est confirmée en janvier 2021, lors du treizième Congrès du PCVN, par son accession au Bureau politique. Elle se confirme donc au niveau des structures sommitales de l’Etat par ce poste de premier ministre. De ses performances dans ses nouvelles et difficiles fonctions (poursuite du développement économique du pays avec en ligne de mire l’objectif de faire du Viêt Nam un pays développé à l’horizon 2030, poursuite de la lutte contre le COVID-19, mais aussi les tensions en mer « de l’Est ») dépendra sa progression future. Son relatif jeune âge lui offre en effet un réel potentiel de progression dans les instances sommitales du Parti (succession de Nguyễn Phú Trọng ?). 

Les quatre postes angulaires de l’Etat étant élus avec sans surprise un véritable plébiscite de la part des députés, les votes se sont poursuivis pour désigner les nouveaux dirigeants des principales instances dirigeantes du pays, tant au niveau de l’assemblée nationale que du gouvernement. Le général d’armée Ngô Xuân Lịch, qui n’avait pas été reconduit au sein du Comité central du Parti lors du Congrès de janvier, a achevé sa carrière quelques jours avant son 67ème anniversaire (20 avril). Il est remplacé par le général de corps d’armée Phan Văn Giang, qui était à la tête de l’état-major général des armées depuis le mai 2016. Une élection (avec près de 95 % des votes des députés) logique, qui permet à un homme au parcours opérationnel, et non à un commissaire politique en chef, de prendre en main le ministère de la défense. 

Le général Giang félicité par le président de l'assemblée nationale  (08/04/2021)

En toute logique, le général de corps d’armée Nguyễn Tân Cương (55 ans depuis le 12 février), plus ancien des « jeunes » vice-ministres actuellement en fonction (depuis décembre 2019), prendra la tête de l’état-major général des armées. (Nous y reviendrons plus longuement).

L'incertitude demeure en revanche sur la fonction qui sera confiée au général d'armée Lương Cường, ex-direteuir deu Département général Politique du ministère de La Défense, et lui aussi élu au Bureau politique du Comité central du PCVN. 

L’on assiste donc à la fin d’une période de relève de générations, entamée depuis plusieurs mois par des ajustements dans les grands organes de l’Etat – et que nous avons suivis tant au ministère de la défense qu’à l’état-major des armées -, confirmée lors du treizième Congrès du PCVN mi-janvier (avec la représentation de 24 militaires (*) au sein du Comité central dont deux au Bureau politique), affinée lors de cette session de l’assemblée nationale. Les élections législatives du 23 mai ne bousculeront pas ces nominations. Les membres de la « vieille génération » encore dans leurs fonctions finiront de s’effacer, laissant ainsi les équipes renouvelées poursuivre leur mission, sous la houlette des hauts dirigeants investis pour cinq ans.

 

(*) 23 en service sous l’uniforme voir ci-dessous), plus le général de brigade Nguyễn Mạnh Hùng, ex-PDG de Viettel, puissant consortium spécialisé dans les télécommunications, entreprise phare du Département général des industries de défense, qui a été nommé en juillet 2018 ministre de l’information et des télécommunications.

Les militaires élus au Comité central du PCVN en janvier 2021


mardi 30 mars 2021

Début de la relève du Rôle 2 vietnamien au Soudan du Sud (24/03/2021)

L’heure de la relève des 63 membres du service de santé des armées vietnamiennes déployés depuis novembre 2019 à Bentiu, au Soudan du sud, a enfin sonné.

Après plus d’un an de montée en puissance, le troisième contingent constitué pour mettre en œuvre cet hôpital militaire de campagne (Rôle 2) sous les couleurs de la Mission des Nations unies au Soudan du sud (MINUSS) a commencé sa projection. Tout comme ce fut le cas pour l’unité pionnière dans cette mission africaine, fin 2018, cette unité a été agrégée autour d’une ossature de l’Hôpital militaire 175 de Hồ Chí Minh-Ville, avec quelques renforts individuels prélevés dans les 2e, 7e et 9e Régions militaires et du 4e Corps d’armée. 

Commandé par le lieutenant-colonel (docteur) Trịnh Mỹ Hòa (ci-dessus), ce détachement comprend 64 militaires dont 13 femmes


Le capitaine Tống Vân Anh et son épouse, la capitaine supérieure Đỗ Thanh Tùng,
unis dans la vie et travaillant au sein de l'Hôpital militaire 175, 
sont le second couple projeté à Bentiu.

Tout comme lors de la précédente relève, à l’automne 2019, le détachement rejoint Juba puis Bentiu en deux rotations : celle du 24 mars et une seconde le 21 avril.

C’est donc tout naturellement que les autorités ont convergé vers la grande métropole du Sud pour saluer l’ensemble du détachement, lors d’une double cérémonie, le 23 mars essentiellement entre militaires vietnamiens et le 24 mars dans l’enceinte militaire de l’aéroport d’Hồ Chí Minh-Ville Tân Sơn Nhất, avec présence d’officiels étrangers.

Ces cérémonies ont été co-présidées par les généraux de corps d’armée Nguyễn Chí Vịnh, encore pour quelques semaines vice-ministre de la défense chargé des relations internationales, et Hoàng Xuân Chiến, son successeur (ci-dessous au centre). 

A leurs côtés figuraient notamment:

  • le GCA Trần Quang Phương, l’un des adjoints au directeur du Département général Politique du ministère de la défense ;
  • les généraux de division Phùng Sĩ Tấn, adjoint au chef de l’état-major général des armées et vice-président du comité chargé des activités relatives aux opérations de maintien de la paix;
  • le général de brigade Hoàng Kim Phụng, commandant le Département des opérations de maintien de la paix du ministère de la défense ;
  • l’ambassadrice australienne Robyn Mudie et son attaché de défense, le colonel Paul Foura (ci-dessus avec le GBR Phụng);
  • et des représentants du corps diplomatique, dont quelques attachés de défense, en poste au Viêt Nam.

Pandémie de COVID-19 oblige, aucun haut représentant des Nations unies n’avait fait le déplacement jusqu’au Viêt Nam. Le secrétaire général adjoint des Nations unies Atul Khare a cependant participé par visioconférence à la cérémonie de départ durant laquelle le général Tấn a dans un premier temps officialisé la mise à disposition du détachement au DOMP vietnamien. Puis, après avoir reçu son mandat, et le drapeau national, la première moitié du détachement a fait ses adieux aux dirigeants de l’Hôpital 175, aux familles qui avaient faire le déplacement, et a embarqué à bord du C-17 mis à disposition par l’armée de l’air australienne. 

Décollage à 18h20.
Comme lors des précédentes projections, la communication entourant l’événement a été très nourrie, plaçant du côté vietnamien l’accent sur la motivation du personnel composant ce détachement, son enthousiasme pour porter haut les couleurs de l’armée populaire vietnamienne sur le sol africain, et sa capacité à faire face à des conditions de vie et de travail souvent difficiles. 

Dans le même temps, l’ambassadrice australienne a déployé sourires et puissance de communication sur les réseaux sociaux, pour mettre en valeur – à juste titre – l’engagement de Canberra aux côtés des militaires vietnamiens engagés dans la MINUSS. Une mission à laquelle l’Australie contribue d’ailleurs au travers de l’engagement d’une vingtaine de soldats (opération Aslan) essentiellement dans des missions logistiques. Ceci explique la facilité avec laquelle les Australiens fournissent le transport stratégique permettant de projeter les contingents vietnamiens. 

Après près de deux jours de transit, lC-17 s’est posé le 26 mars à Juba. Brandissant à nouveau les drapeaux vietnamien et onusien, le LCL Hoà et la moitié de son détachement ont été accueillis par leurs camarades insérés à l’état-major de la MINUSS. Lutte contre la pandémie de COVID-19 oblige, tous ont été soumis à un protocole sanitaire strict, avec décontamination dès la descente d’avion puis placement en quatorzaine dans un compound de la MINUSS à Juba. Ce ne sera donc que vers le 10 avril qu’ils seront autorisés à rejoindre Bentiu.

Il faudra attendre début mai pour que l'ensemble du Rôle 2 soit enfin opérationnel, après la sortie de quarantaine de la seconde moitié du détachement (vers le 05 mai). Nul doute que le détachement commandé par le LCL (docteur) Võ Văn Hiển, qui a d’ores et déjà établi un record de durée pour un contingent vietnamien sous mandat onusien (plus de 16 mois), voit enfin approcher le moment de la fin de son désengagement et du retour vers Hanoi, où il sera certainement salué avec chaleur et honneurs ! 

Un désengagement qui a bien commencé et qui a été salué à nouveau, dès le 30 mars par l'ambassadrice d'Australie, et ce avant même les médias vietnamiens! La diplomatie australienne à la pointe de la communication opérationnelle, well done Canberra!

Le C-17 numéro 208 rapatriant la moitié des effectifs du second Rôle 2 vietnamien.


mercredi 24 mars 2021

27, 28 (février), 3, 18 (mars), fin de série!

Les 27 et 28 février, puis les 03 et 18 mars 2021, le ministère vietnamien de la défense a procédé à l’unique phase de conscription annuelle. Intervenant comme chaque année après les festivités du Tết, qui avaient elles-mêmes été précédées par le retour à la vie civile du contingent incorporé en 2019 (le pays est revenu depuis le 1er janvier 2016 à un service militaire de deux ans), cette opération d’ampleur nationale a de nouveau mis en avant l’important maillage territorial de l’armée, et notamment les commandements militaires des provinces, districts et communes, ainsi que les sept régions militaires. 

Si la communication médiatique qui a entouré cet événement a été intense, du plus haut niveau national jusqu’à celui des districts et communes, les festivités traditionnellement associées à cet événement symbolique du lien entre l’armée et la nation ont été réduites à leur plus simple expression en raison de la campagne de lutte contre la pandémie de COVID-19. Le decorum a ainsi été très coloré mais les cérémonies se sont dans la grande majorité des sites limitées, comme l’an passé, à moins d’une demi-heure. Il est vrai que la forte décentralisation de cet appel sous les drapeaux ne conduit pas à de grands rassemblements de conscrits. Et en cette année encore plus qu’en février 2020 les familles et amis des conscrits n’étaient pas invités à entourer les partants. 

Le GDI Nguyễn Trọng Bình, adjoint au chef 
de l'état-major général des armées, à Huế (27/02)
De même, les très hautes autorités du ministère de la défense se sont moins mises en valeur « au contact » des jeunes recrues et des citoyens. L’on y verra non une marque de suffisance liée au renouvellement de générations de très hauts dirigeants durant le treizième Congrès national du Parti communiste vietnamien, fin janvier, mais surtout l’impact des mesures de prévention de la pandémie. A l’approche des législatives du 23 mai, les candidats à l’élection auraient aussi pu trouver un terrain propice à se mettre en valeur auprès de l’opinion publique, ce qui n’a pas non plus été le cas. 

Les observateurs auront noté qu’il ne semble pas y avoir de maquette d’incorporation immuable : contrairement à 2020 qui n’a pas réellement donné lieu à des séquences par grandes régions, l’appel sous les drapeaux s’est cette année échelonné du nord au sud. Seule exception à la règle, la province de Hải Dương, qui aurait dû appartenir au groupe des provinces incorporant le 27 février, a d’emblée bénéficié d’un décalage de l’incorporation au 09 mars en raison de l’épidémie de COVID-19 qui touchait la province ; l’emprise de la pandémie restant forte, un nouveau report a été décidé, cette fois au 18 mars. 

Cette séquence, qui a concerné 2 400 jeunes, a conclu cette sélection annuelle. Avec un volume total de recrues proche de celui de l’an passé, l’armée ne prélève au bilan chaque année qu’une infime part des forces vives du pays, selon un procédé de calcul qui fait peser - en pourcentage de la population - la plus lourde contribution aux provinces les plus rurales, tandis que Hà Nội et Hồ Chí Minh-Ville fournissent des contingents qui peuvent dans l’absolu être significatifs mais ne sont qu’une goutte d’eau comparés à leurs très fortes populations. Cette tendance est durable, de même que la forte représentation des classes d’âge de 18 à 21 ans (les deux tiers des conscrits). (*)

Le rideau est désormais tombé, les reportages terminés, les « portes de gloire » (cổng vinh quang) démontées, place désormais à l’instruction de base des jeunes combattants, qui ont été injectés dans toutes les composantes de l’armée – et à un moindre niveau des unités de la sécurité publique. 

Honneur aux combattants!

(*) La forte opacité qui entoure ces questions de ressources humaines se traduit par une grande difficulté pour évaluer le nombre de soldats effectivement recrutés et leur profil. Aucun bilan officiel global n’est divulgué sur cet appel sous les drapeaux. Tout comme l’an passé, le long travail mené pour établir ces bilans conduit La Rue des Soldats à conserver la discrétion sur ces chiffres. 

lundi 15 mars 2021

Remise de lettre de mission au LCL Trần Đức Hưởng, second officier rejoignant le DOMP à New York (12/03/2021)

 

Le 12 mars 2021, le général de corps d’armée Nguyễn Chí Vịnh, vice-ministre de la défense, chargé des relations internationales et chef du comité national compétent pour les questions de montée en puissance des capacités vietnamiennes relatives aux opérations de maintien de la paix (OMP) des Nations unies, a remis sa lettre de mission au lieutenant-colonel Trần Đức Hưởng, qui va rejoindre le bureau génération de forces du Département des OMP (DOMP) au siège des Nations unies à New York.

Cet officier possède déjà une expérience réelle de service sous béret bleu. Outre son appartenance au DOMP vietnamien / Viêt Nam Peacekeeping Center (VNPKC), il avait été projeté en avril 2016, pour un an, à Bangui au sein de l’état-major de la MINUSCA (relève du premier détachement d’insérés vietnamiens) puis, en novembre 2018 au Soudan du sud en tant qu’officier observateur, à nouveau pour un an (photo ci-contre).


Il rejoindra à New York le LCL Lương Trường Vinh, premier officier vietnamien à avoir vu sa candidature pour un poste à New York retenue - là aussi en tant qu’officier planification - fin janvier 2020. Les deux hommes se connaissent très bien, car ils ont déjà servi ensemble en république Centrafricaine et bien sûr au DOMP/VNPKC. Lui aussi possède déjà une belle expérience africaine : d’avril 2016 à avril 2017, il avait aussi participé au second mandat vietnamien au sein de la MINUSCA puis, fin 2019, avait été projeté pour un an au Soudan du sud en tant qu’observateur. 


Ces officiers présentent de belles qualités pour s’insérer dans cet environnement multinational au plus haut niveau de la structure d’état-major onusienne. Ces véritables pionniers des OMP à la vietnamienne continueront sans nul doute d’enrichir leurs connaissances du milieu onusien, au contact aussi de la représentation permanente vietnamienne auprès des Nations unies. Ils seront en outre de bons canaux d’information pour leur structure nationale, notamment sur les missions pour lesquelles des militaires vietnamiens pourraient être proposés (cas du détachement du génie et de son unité de protection). Enfin, ils présentent dès à présent d’excellents profils pour intégrer à l’horizon 2025 le sommet de la hiérarchie du DOMP/VNPKC, tant cette petite structure tient à conserver ses cadres les plus expérimentés, pour continuer à forger un « esprit OMP » au sein des militaires qui intègrent le vivier OMP de l’armée vietnamienne.


Que de chemin parcouru (et pas que sur la maîtrise du port du béret!) depuis cette photo, prise il y a cinq ans!

A gauche, le commandant Lương Trường Vinh;
à ses côtés, le capitaine supérieur Trần Đức Hưởng (5 avril 2016)




samedi 13 mars 2021

Première escale de l'année au Viêt Nam: la frégate française Prairial à Cam Ranh (09-12/03/2021)

Après une année 2020 désastreuse sur le plan de la fréquentation de ses ports militaires par des bâtiments étrangers, en raison de la pandémie de COVID-19, il a fallu attendre ce mois de mars 2021 pour voir un pavillon étranger accoster au Viêt Nam, en l’occurrence à Cam Ranh. Un choix sans ambiguïté, aucun autre port ne semblant offrir de meilleures conditions d’accueil d’un équipage étranger avec le risque minimal de contamination par le virus. Le site naturel de la rade, qui accueille les infrastructures de la 4e Région maritime et les fleurons de la marine populaire (les quatre frégates Gepard et les six sous-marins Kilo), a permis le développement d’un « port international » permettant l’accueil des bâtiments étrangers à l’abri des regards et en toute sécurité. Ce site aurait dû accueillir l’an dernier les bâtiments qui étaient attendues à la revue navale internationales qui devait être organisée au large de Nha Trang mais qui, après avoir été dans un premier temps reportée, a fini par être annulée en raison de l’impact du COVID sur les déploiements internationaux. En 2020, le port international de Cam Ranh n’a  accueilli qu’une escale – celle d’un groupe naval japonais les 10 et 11 octobrecontre dix en 2019.

Le premier bâtiment à y faire relâche cette année, du 09 au 12 mars, a arboré les couleurs françaises. La frégate de surveillance Prairial (F-731), commandée par le capitaine de frégate Pierre-Louis Josselin, est en effet déployée dans le Pacifique ouest depuis fin janvier. Elle est arrivée en provenance de Sasebo (Japon) où elle avait effectué une escale technique du 20 au 23 février. L’accostage à Cam Ranh, malgré les conditions sanitaires drastiques, était attendu par tout l’équipage, qui bénéficiait pour la première fois depuis son départ de Tahiti d’une période de « régénération » à terre. Un fait exceptionnel qui a été salué tant par l’ambassade de France que par le contre-amiral Rey depuis Papeete. 


A cet égard, la communication vietnamienne sur cette escale semble avoir essentiellement consisté en une reprise, par les principaux médias, d’éléments fournis par les autorités françaises locales, et notamment l’attaché de défense. L’on y verra un effet des précautions sanitaires en vigueur dans le pays mais aussi dans les nations visiteuses : isolement du quai, véritable opération de décontamination du personnel lors de son débarquement, absence de comité d’accueil et de conférence de presse sur le quai, les militaires vietnamiens ont visiblement établi un cordon sanitaire étanche, conditionnant le succès de l’escale. Un effort exceptionnel dont l’impact se fera sentir durablement et certainement positivement, le Viêt Nam voulant s’afficher comme un acteur vertueux dans la lutte contre la pandémie – avec des résultats qui ont été salués sur la scène internationale, y compris par l’ambassadeur des Etats-Unis, Dan Kritenbrink, et l’ex-ambassadeur de France Jean-Noël Poirier.

L’escale a donc été médiatisée (11 mars) alors qu’elle touchait à sa fin. Les articles, quasiment tous similaires, ont diffusé quelques clichés pris par la partie française, et repris des précisions données par l’ambassade de France. Fait peu fréquent dans les commentaires des médias vietnamiens, il a été mis en valeur le fait que ce déploiement participe de la volonté de la France de contribuer à la liberté de circulation en mer « de l’Est », un axe fort de la stratégie indo-pacifique du ministère français des armées français. Sans doute faut-il voir dans ce coup de projecteur sur cette mission la reprise d’éléments qui étaient déjà cités par le bureau communication des forces françaises basées à Tahiti, auxquelles le Prairialappartient, mais aussi la volonté des autorités françaises de valoriser, à très juste titre, l’importante présence navale française dans le Pacifique occidental en ce début d’année 2021. Enfin, à défaut de pouvoir mettre en exergue des interactions physiques avec les autorités vietnamiennes, les médias ont largement repris une information reçue de l’attaché de défense et relative à une intervention technique qui devait être menée sur l’hélicoptère embarqué par la frégate (une vénérable Alouette III) (*). Des propos similaires avaient été tenus par l’ambassade de France à Tokyo à propos de l’escale du Prairial à Sasebo, deux semaines auparavant. Des remerciements appuyés ont été publiquement adressés aux autorités militaires vietnamiennes pour avoir facilité l’intervention d’une équipe de techniciens en provenance de France, ce qui dans le contexte sanitaire très sévère est un geste réellement de nature à favoriser la relation bilatérale.

Alors que la frégate a désormais repris la mer et son transit vers la Polynésie française, l’on gardera l’image d’une escale réussie, avec un impact positif sur la relation militaire vietnamo-française, et dont le professionnalisme avec laquelle elle a été organisée renforce le crédit dont jouit déjà le Viêt Nam dans la lutte internationale contre la pandémie de COVID-19. Nul doute que Cam Ranh devrait voir sa fréquentation en hausse en cette année durant laquelle plusieurs nations déploieront des moyens importants en mer de Chine méridionale. La marine française y est d'ores et déjà attendue à nouveau avec l'escale du porte-hélicoptères amphibie Tonnerre et de la frégate légère furtive Surcouf, déployés dans le cadre de la mission Jeanne d'Arc, en mai.

(*) « Với sự giúp đỡ từ phía Việt Nam, chúng tôi đã mời kỹ sư từ Pháp sang Việt Nam để lên tàu chữa máy bay trực thăng trên đó » (« Avec l'aide de la partie vietnamienne, nous avons fait venir des techniciens depuis la France jusqu’au Viêt Nam pour procéder à la réparation de l’hélicoptère embarqué »).