samedi 24 avril 2021

Escale d'un destroyer japonais à Hải Phòng (20-22/04/2021)

Du 20 au 22 avril 2021, le destroyer japonais Akebono (DD-108) a fait escale à Đình Vũ, le port militaire de Hải Phòng. Le bâtiment, déployé actuellement en mer de Chine méridionale, avait eu précédemment une interaction avec le groupe école de la marine française, avant que celui-ci ne s’affiche conjointement avec deux bâtiments australiens (frégate Anzac et pétrolier ravitailleur Sirius) en mer « de l’Est ». Il avait fait escale en Malaisie puis en Indonésie et s’était plusieurs fois affiché aux côtés des deux bâtiments australiens en mer de Chine méridionale.

Le bâtiment et ses 247 marins sont commandés par le capitaine de vaisseau Hamasaki Shingo. Contexte de pandémie de COVID-19 oblige, les contacts directs avec les autorités locales ont été réduits à leur plus simple expression, mais le pacha du bâtiment a participé a une visioconférence avec les cadets de l’Ecole navale vietnamienne.

Il s’agit de la première escale nippone au Viêt Nam en 2021, et la seconde toutes nations confondues après celle menée par la frégate de surveillance française Prairial à Cam Ranh du 09 au 12 mars. 


mercredi 21 avril 2021

Transfert d'autorité à la tête du Rôle 2 vietnamien de la MINUSS (17/04/2021)

Le 17 avril 2021, l’hôpital militaire de campagne de type Rôle 2 armé par le service de santé des armées vietnamiennes à Bentiu (Soudan du sud) a changé de commandant. Lors d’une petite cérémonie officielle, organisée à huis clos en raison des mesures de distanciation liées à la pandémie de COVID-19, le colonel supérieur Nguyễn Bá Hưng, l’un des adjoints au directeur du Département des opérations de maintien de la paix, a transféré la responsabilité de cet hôpital relevant de la Mission des Nations unies au Soudan du sud (MINUSS) entre les lieutenants-colonels (docteurs) Võ Văn Hiển et Trịnh Mỹ Hòa.

Arrivé à Juba le 26 mars par C-17 australien, le LCL Hoà et la moitié de son détachement avaient dû attendre deux semaines en quatorzaine sanitaire avant de rejoindre Bentiu. Après quatre jours de passations de consignes, les deux médecins ont enfin signé le PV de transfert de responsabilité. 

Le personnel ayant mis en œuvre ce Rôle 2 durant plus de 16 mois, en raison de l’impossibilité de mener des relèves en ces temps de pandémie internationale, va donc pouvoir entamer son retour vers le Viêt Nam le 24 avril, toujours par voie aérienne militaire fournie par l’armée australienne (un C-17 doit être sur le point de récupérer à Hồ Chí Minh-Ville la seconde moitié du personnel du troisième mandat). Une nouvelle page s’ouvre pour le service de santé des armées vietnamiennes, avec ce nouveau mandat au service de populations qui voient le drapeau onusien comme une marque de salut dans leur vie d’incertitudes. Le temps des pionniers appartient déjà au passé, place à celui de la consolidation de l’image de l’armée vietnamienne au service de la paix internationale. 

samedi 17 avril 2021

L'ambassadeur du Viêt Nam en France promu commandeur de la Légion d'honneur (09/04/2021)

Le 09 avril 2021, M. Bertrand Lortholary, directeur Asie-Océanie du ministère français de l’Europe et des affaires étrangères (et ambassadeur de France à Hà Nội d’août 2016 à l’été 2019), a remis à l’ambassadeur du Viêt Nam en France, M. Nguyễn Thiệp, la cravate de commandeur de l’Ordre national de la Légion d’honneur. 

L’attribution de cette décoration prestigieuse directement au rang de commandeur au représentant du régime de Hà Nội en France, a de quoi susciter l’interrogation. Non sur l’Ordre en tant que tel, la diplomatie française faisant souvent fi de l’Histoire - contrairement à la diplomatie vietnamienne - et de la nature du régime représenté par l’ambassadeur Thiệp, mais sur le rang dans la hiérarchie de la décoration.

L’on rappellera que M. Lortholary avait été honoré après son retour en France par l’attribution de la médaille de l’amitié de l’Etat vietnamien. Elle lui avait justement été remise par l'ambassadeur Thiệp, lors de la fête nationale vietnamienne. Une décoration importante certes mais taillée sur mesure pour saluer les hauts responsables (essentiellement les ambassadeurs, pour ce qui relève de la diplomatie) ayant animé la relation bilatérale. L’ambassadeur des Etats-Unis Daniel Kritenbrink, qui termine son mandat, l’a au demeurant reçue ce même 09 avril, des mains du vice-ministre des affaires étrangères Nguyễn Quốc Dũng, au nom du président Nguyễn Xuân Phúc (et non plusieurs mois après qu’il aura quitté le pays. Un fossé existe entre cette distinction et le rang de commandeur d’un Ordre aussi prestigieux que la Légion d'honneur, qui reconnaît des services éminents rendus à la nation française. Sans nier la bonne dynamique de la relation franco-vietnamienne, des observateurs pourraient se demander si ce geste n’est pas un pari sur et pour le futur de la relation bilatérale. Avec l’Asie qui cristallise de plus en plus les ambitions des nations occidentales (et toujours de la Chine), qui se traduisent par une recrudescence actuelle de la publication de stratégies indopacifiques - notamment par la France – tous les atouts peuvent peser pour gagner les faveurs des dirigeants vietnamiens. Et une décoration peut être une goutte d’huile facile à verser dans le grand jeu de la compétition internationale, surtout à un moment où le PCVN et les hautes instances de l’Etat vietnamien viennent de renouveler leurs plus hauts dirigeants pour cinq ans. 

La non médiatisation de cette cérémonie, tout au moins du côté français, pourrait aussi avoir visé à ne pas froisser le monde toujours légitimement sensible des anciens combattants, en cette période qui coïncide avec le souvenir toujours vivant du milieu de la bataille de Điện Biên Phủ, il y a 67 ans. 

L’avenir dira si cette diplomatie de la décoration portera des fruits. En tout état de cause, reconnaître à un tel niveau les services de l’ambassadeur Thiệp donne le "la" de la reconnaissance dont devrait bénéficier son successeur. En plaçant la barre aussi haut, la diplomatie française pourrait se lier les mains : il lui sera en effet difficile de ne pas reconnaître les services que le successeur de l’ambassadeur Thiệp rendra durant son mandat, au risque de lui faire perdre la face, ce qui n’est pas acceptable. Un pari osé, qui profite en tout état de cause actuellement à la diplomatie vietnamienne, si l’on en juge la forte médiatisation dans la presse vietnamienne de cette remise de cravate. Une cravate qui, espérons-le, n’étranglera pas les ambitions françaises sur tous les champs de la relation bilatérale.

jeudi 15 avril 2021

Premiers contacts internationaux du GCA Phan Văn Giang: pays-frères d'abord! (14/04/2021)

Il n’aura pas fallu attendre longtemps pour que le général de corps d’armée Phan Văn Giang, nouveau ministre vietnamien de la défense, se positionne dans le domaine des relations internationales militaires. Histoire, politique et diplomatie de défense étant indissociables dans les relations extérieures vietnamiennes, c’est tout naturellement que le général Giang a reçu ce 14 avril 2021 les ambassadeurs des quatre emblématiques partenaires de l’armée populaire vietnamienne.

Honneur aux « pays-frères », il a reçu successivement le matin, sous le regard toujours serein d’Hồ Chí Minh :

  • M. Sengphet Houngbuongnuang, l’ambassadeur du Laos, pays lié au Viêt Nam par le traité d’amitié et de coopération du 18 juillet 1977, qui soude la « relation spéciale » forgée dans les guerres de libération et qui n’a jamais été démentie. Une relation que le général Giang s’est naturellement engagé à continuer d’approfondir, à l’image de tous les dirigeants vietnamiens ;
  • puis M. Chay Navuth, l’ambassadeur du Cambodge, dont l’histoire et la société restent marqués par l’influence vietnamienne ; 
  • et enfin M. Viktor Vnukov, l’ambassadeur de Russie. Autant le général Giang a aisément tenu des propos de « grand frère » avec ses deux premiers visiteurs, avec des propos forcément convenus, autant l’entretien avec le représentant de Moscou a trouvé plus de profondeur, en raison de la toujours forte dépendance - ou « partenariat » en des termes moins durs pour celui qui est dans cette position d’infériorité - de l’armée vietnamienne envers l’incontournable partenaire russe. Une relation poussée jusqu’au niveau le plus honorifique, comme le président Putin vient de l’illustrer le 29 mars, en décernant l’Ordre de l’Amitié aux généraux d’armée Ngô Xuân Lịch et Lương Cường ainsi qu’aux généraux de corps d’armée Phan Văn Giang et Bế Xuân Trường pour leur contribution au resserrement des liens entre armées-« sœurs ». Une décoration en appelant une autre, le général Giang a exprimé son intention de se rendre prochainement à Moscou afin de remettre une décoration similaire à l’état-major des armées russe, au terme de cette année croisée durant laquelle Moscou et Hanoi ont célébré le 70e anniversaire de l’établissement de leurs relations diplomatiques, sans grand faste en raison de la pandémie de COVID-19. Ce déplacement pourrait intervenir à la fin de l’été, à l’occasion des Army Games(22 août au 04 septembre). 
  • Relégué en quatrième position, l’ambassadeur chinois Xiong Bo a été reçu dans l’après-midi. Après deux années marquées par une relative fraîcheur des relations bilatérales, en raison de l’activisme chinois en mer de Chine méridionale, comme cela s’était passé cinq ans auparavant dans un contexte similaire de grandes échéances politiques au Viêt Nam, l’heure devrait être à la reprise de contact « du fort au plus faible ». Le général Giang a ainsi annoncé une prochaine visite à Hà Nội du général Wei Fenghe, ministre chinois de la défense, dans une logique traditionnelle de bon voisinage nourries entre plus hauts dirigeants militaires et des Parti communistes respectifs, garants de la bonne relation entre régimes unis idéologiquement. Aucune date n’a été évoquée pour cette visite, sans doute en raison des incertitudes du calendrier diplomatique et du contexte sanitaire. La dernière visite du général Wei Fenghe à Hà Nội avait eu lieu fin mai 2019, juste en amont de l’ouverture de la session annuelle du Shangri-La Dialogue à Singapour. L’édition 2021 de cet événement phare de la diplomatie de défense en Indo-Pacifique pourrait offrir l’opportunité au dirigeant chinois de faire une halte au Viêt Nam. 

Cette première prise de contact du général Giang avec les représentants des partenaires historiques de l’armée populaire vietnamienne est logique. Il importera désormais de voir dans quel ordre le ministre de la défense recevra les représentants des autres pays partenaires du Viêt Nam. Les prétendants ne manquent pas, avec ceux de l’ASEAN - dont le Viêt Nam a assuré la présidence en 2020 – mais aussi les grandes nations de l’Indo-Pacifique (Etats-Unis, Australie, Japon) et celles qui cherchent à faire reconnaître leur statut de puissance régionale (France) voire d’acquérir une légitimité (Royaume-Uni, et jusqu’à l’Allemagne et l’Union européenne). 


mardi 13 avril 2021

Le général de corps d’armée Phan Văn Giang, nouveau ministre de la défense (08/04/2021)

Le 08 avril 2021, presque cinq ans jour pour jour après avoir été nommé vice-ministre de la défense (12 avril 2016), le général de corps d’armée Phan Văn Giang, chef de l’état-major général des armées, a été élu par les députés réunis en une onzième session de la quatorzième législature au poste de ministre de la défense. La cérémonie officielle de passage de témoin entre les ministres prenant et partant s’est déroulée le 09 avril en présence de tous les militaires membres de la Commission militaire centrale.

Sans cérémonial particulier, le général d’armée Ngô Xuân Lịch a été salué par tous ses proches collaborateurs

Entré en service en 1972, à 18 ans, à la fin de la guerre contre les Américains, Ngô Xuân Lịch a notamment combattu dans le sud-ouest (lors de la campagne Hô Chi Minh). Puis il a intégré le corps des commissaires politiques (Département général Politique du ministère de la défense), au sein duquel il a effectué toute sa carrière jusqu’au sommet de la hiérarchie. En mars 2011, il a pris la tête de ce très puissant département, accédant de fait au poste de numéro 2 du ministère, derrière le ministre (général d’armée Phùng Quang Thanh). Promu général d’armée le 5 octobre 2015, il a été élu le 9 avril 2016 ministre de la défense, bénéficiant certainement de sa proximité avec le secrétaire général du Parti communiste vietnamien Nguyễn Phú Trọng. Son principal concurrent pour ce poste prestigieux, le général d’armée Đỗ Bá Tỵ, plus ouvert aux relations avec les nations occidentales à l’image de la dynamique du premier ministre d’alors Nguyễn Tấn Dũng, a probablement fait les frais de l’éviction de ce dernier de la course au poste du numéro 1 du pays. Sans surprise pour un « commissaire politique en chef », l’action du général Lịch s’est concentrée sur la scène intérieure, hormis quelques rares déplacements à l’étranger : Chine, Russie bien sûr, proches partenaires du Viêt Nam au sein de l’ASEAN - dont il a dû animer les instances de défense en 2020 -, Washington, Tokyo, Paris mais aussi Bruxelles et ses instances de l’Union européenne, sans oublier l’incontournable voyage à La Havane malgré la pandémie de COVID-19. Homme-clé des instances dirigeantes du Parti communiste vietnamien, ce fidèle du secrétaire général Nguyễn Phú Trọng a certainement permis de maintenir une relation de respect avec l’incontournable voisin chinois, qui a continué ses provocations dans les eaux de la mer « de l’Est » revendiquées par Hà Nội. Quittant l’institution après 49 ans de service, le général Lịch laissera une empreinte de son influence jusque dans le Bureau politique du Comité central du Parti, où le général d’armée Lương Cường, son successeur en 2016 à la tête du Département général Politique, a fait son entrée en janvier, en même temps que le général Giang. Une situation inédite depuis vingt ans. 

 

Avec l’arrivée du général Giang à la tête du ministère, l’on assiste au retour d’un opérationnel au premier plan. Né en octobre 1960 dans la province de Nam Định (Nord), Phan Văn Giang s’est engagé à 18 ans comme simple combattant, durant le bref conflit contre les Chinois sur la frontière nord. Ayant connu le baptême du feu dans les combats près de Cao Bằng, il a ensuite entamé une carrière d’officier de cavalerie (scolarité à l’école des blindés de 1980 à 1983) puis effectué la quasi-totalité de sa carrière au sein du 1er Corps d’armée (état-major à Ninh Bình), qu’il a commandé de 2010 à 2011 avant d’être nommé à un poste d’adjoint au chef d’état-major général des armées. 

Son parcours s’est poursuivi, toujours dans le Nord du pays, avec la prise de commandement de la 1ère région militaire, en avril 2014. C’est tout logiquement qu’il a fait son entrée au Comité central du Parti communiste lors du 12e Congrès national (janvier 2016) et a été nommé vice-ministre de la défense (avril 2016) puis chef de l’état-major général des armées (mai 2016). Sa jeunesse (61 ans), son parcours réussi, mais aussi l’âge relativement élevé des potentiels prétendants du Département général Politique au poste de ministre, ont été autant d’atouts qui ont pesé pour son élection à la succession du général Lịch.

Si sa légitimité est incontestable (il sera élu à un poste de député lors des élections législatives du 23 mai, puis confirmé dans son poste de ministre par les députés de la nouvelle législature), il lui incombera de se démarquer de son prédécesseur sur la scène des relations internationales de défense, sur laquelle le général Lịch était peu à l’aise. Un premier test de la volonté du nouveau ministre de rechercher le contact, même en cette période de confinement forcé, devrait être le rendez-vous incontournable de l’Indo-Pacifique de la défense qu’est le Shangri-La Dialogue, organisé les 04 et 05 juin à Singapour, après une année blanche en 2020 en raison de la pandémie de COVID-19. L’on se souvient que le général Lịch ne s’était pas déplacé à cet événement en 2016, après sa prise de fonction, indiquant son manque d’aisance envers ces grands rendez-vous internationaux. Malgré l’organisation très contrainte de cette édition (moins deux jours, dans une bulle sanitaire stricte), les nations de l’Indo-Pacifique rechercheront à être représentées. Il sera difficile au nouveau ministre vietnamien de la défense de ne pas faire le court déplacement jusqu’à Singapour, et ce d’autant plus que le Viêt Nam siège encore pour huit mois au Conseil de sécurité des Nations unies et qu’il n’hésite pas à véritablement démarcher les nations occidentales pour obtenir leur appui diplomatique face à l’affirmation provocatrice de puissance chinoise en mer de Chine méridionale.

Nouveau quinquennat, nouveau chef de file, mais pas un homme nouveau : le général Giang s’inscrira dans la lignée des ministres de la défense, absolument fidèle aux directions du Parti, mobilisé sur toutes les questions relatives à la stabilité du régime, mais certainement aussi confronté au dilemme de trouver une position de « juste milieu » sans sa relation avec un voisin chinois au rapport de force très supérieur, très actif jusque dans ses eaux territoriales, en proie à un bras de fer durable avec les autres « nations de l’Indo-Pacifique », et ce tout en conservant une posture refusant toute alliance avec un pays tiers, toute base étrangère sur son territoire. 

Son successeur au poste de chef de l’état-major des armées n’est pas encore nommé. Pour autant, le général de corps d’armée Nguyễn Tân Cương présente le meilleur profil pour accéder à cette fonction. Très jeune (55 ans), ce proche du général Giang lui a déjà succédé par deux fois à la tête d’unités de tout premier plan, d’abord en 2008 à la tête de la prestigieuse Division 312 (Sư đoàn Chiến Thắng, division de La Victoire – de Điện Biên Phủ), ensuite en 2011 à celle du 1er Corps d’armée, puis l’a rejoint dans le comité des adjoints au chef de l’état-major des armées. Il est le général de corps d’armée qui présente le plus haut potentiel de progression, y compris pour succéder à nouveau, dans cinq ans, au général Giang au sommet de la pyramide des armées. Là aussi, le changement continuera de s'inscrire dans la continuité.

jeudi 8 avril 2021

Relève de générations à la tête des instances dirigeantes du Viêt Nam (31/03 au 08/04/2021)

Alors que les élections législatives ne sont prévues que le 23 mai, l’assemblée nationale, réunie en une onzième session, a procédé au renouvèlement des plus hautes autorités de l’Etat (président de la république, premier ministre, président de l’assemblée nationale) et du gouvernement. Comme nous le soulignions il y a cinq ans, le procédé peut laisser dubitatif, les élections n’étant pas encore organisées, mais il n’a que pour but d’entériner les décisions prises lors du treizième Congrès national du Parti communiste (PCVN), fin janvier. Les électeurs s’exprimeront au bilan uniquement pour confirmer ces décisions, avec comme seul véritable enjeu pour les nouveaux élus - tous députés - d’obtenir la plus forte « cote d’amour », un pourcentage de vote sur leur nom le plus proche possible des 100 %...

Ainsi, le 31 mars 2021, l’assemblée nationale a élu avec plus de 98 % des votes des députés présents M. Vương Đình Huệ pour succéder à Mme Nguyễn Thị Kim Ngân à la tête de cette instance. Âgé de 64 ans, ce Nordiste (il est né dans la province du Nghệ An) succède à une Sudiste, de surcroît la première femme qui avait jamais occupé ce poste prestigieux. 

Membre du PCVN depuis 37 ans (il a fait son entrée au Comité central en 2006 et au Bureau politique en 2011, et est secrétaire du comité du Parti de la capitale), ce docteur en économie formé en Slovaquie (où il a vécu l’explosion du bloc de l’Est à la fin des années 1980), possède comme son prédécesseur une expérience ministérielle réussie (ministre de l’économie puis vice-premier ministre). 

Après cette première nomination, les députés ont élu le 02 avril un nouveau président de la république. Après deux ans et demi de cumul de la fonction de secrétaire général du PCVN et de chef de l’Etat, Nguyễn Phú Trọng passe (enfin !) officiellement le flambeau de la fonction présidentielle à M. Nguyễn Xuân Phúc

L’ex-premier ministre (né dans le Centre du pays en 1954), qui a tenu cette fonction avec abnégation et permis au pays de se mobiliser efficacement dans les campagnes de lutte contre la pandémie de COVID-19 et contre les récentes inondations, voit son travail récompensé et ses capacités reconnues (il est élu avec près de 93 % des votes des députés). Très tourné vers l’étranger, il continuera d’incarner sur la scène internationale la volonté de Hà Nội de poursuivre son intégration dans la communauté des nations, une posture pour laquelle Nguyễn Phú Trọng, dans la lignée des secrétaires généraux du PCVN, était par essence bien moins affûté – sauf au sein du cercle très fermé des pays-frères. Si l’on assiste donc bien à un retour à une normalité pour ce qui est du découplage des fonctions secrétaire général du Parti et président de la république, l’accession d’un ex-premier ministre à la fonction présidentielle est une surprise.

Enfin, dans un registre de la surprise un peu plus marquée, un homme fort mais sans réelle expérience de la gestion des questions économiques au niveau étatique accède au poste de premier ministre (avec plus de 96 % d’approbation par les députés). M. Phạm Minh Chính, Nordiste (il est originaire de la province de Thanh Hóa) âgé de 60 ans, a effectué la grande majorité de sa carrière au sein du puissant ministère de la sécurité publique (Công An). 

Lui aussi formé au contact d’un pays du bloc de l’Est - la Roumanie, où il a été premier secrétaire à l’ambassade du Vietnam à Bucarest jusqu’en 1996, et a donc lui aussi assisté de visu à l’effondrement du régime communiste dans ce pays – il a gravi les échelons dans le sommet de la pyramide de la Công An pour accéder au rang de général de division en 2010 puis a un poste de vice-ministre. En 2011, à 50 ans, il a fait son entrée au Comité central du PCVN et a été nommé secrétaire du Parti pour la province de Quảng Ninh, où il a manifestement obtenu de bons résultats en matière de gestion du développement. Reconduit au Comité central cinq ans plus tard, il a pris en 2016 la tête de la Commission de l’organisation du Parti. Son ascension s’est confirmée en janvier 2021, lors du treizième Congrès du PCVN, par son accession au Bureau politique. Elle se confirme donc au niveau des structures sommitales de l’Etat par ce poste de premier ministre. De ses performances dans ses nouvelles et difficiles fonctions (poursuite du développement économique du pays avec en ligne de mire l’objectif de faire du Viêt Nam un pays développé à l’horizon 2030, poursuite de la lutte contre le COVID-19, mais aussi les tensions en mer « de l’Est ») dépendra sa progression future. Son relatif jeune âge lui offre en effet un réel potentiel de progression dans les instances sommitales du Parti (succession de Nguyễn Phú Trọng ?). 

Les quatre postes angulaires de l’Etat étant élus avec sans surprise un véritable plébiscite de la part des députés, les votes se sont poursuivis pour désigner les nouveaux dirigeants des principales instances dirigeantes du pays, tant au niveau de l’assemblée nationale que du gouvernement. Le général d’armée Ngô Xuân Lịch, qui n’avait pas été reconduit au sein du Comité central du Parti lors du Congrès de janvier, a achevé sa carrière quelques jours avant son 67ème anniversaire (20 avril). Il est remplacé par le général de corps d’armée Phan Văn Giang, qui était à la tête de l’état-major général des armées depuis le mai 2016. Une élection (avec près de 95 % des votes des députés) logique, qui permet à un homme au parcours opérationnel, et non à un commissaire politique en chef, de prendre en main le ministère de la défense. 

Le général Giang félicité par le président de l'assemblée nationale  (08/04/2021)

En toute logique, le général de corps d’armée Nguyễn Tân Cương (55 ans depuis le 12 février), plus ancien des « jeunes » vice-ministres actuellement en fonction (depuis décembre 2019), prendra la tête de l’état-major général des armées. (Nous y reviendrons plus longuement).

L'incertitude demeure en revanche sur la fonction qui sera confiée au général d'armée Lương Cường, ex-direteuir deu Département général Politique du ministère de La Défense, et lui aussi élu au Bureau politique du Comité central du PCVN. 

L’on assiste donc à la fin d’une période de relève de générations, entamée depuis plusieurs mois par des ajustements dans les grands organes de l’Etat – et que nous avons suivis tant au ministère de la défense qu’à l’état-major des armées -, confirmée lors du treizième Congrès du PCVN mi-janvier (avec la représentation de 24 militaires (*) au sein du Comité central dont deux au Bureau politique), affinée lors de cette session de l’assemblée nationale. Les élections législatives du 23 mai ne bousculeront pas ces nominations. Les membres de la « vieille génération » encore dans leurs fonctions finiront de s’effacer, laissant ainsi les équipes renouvelées poursuivre leur mission, sous la houlette des hauts dirigeants investis pour cinq ans.

 

(*) 23 en service sous l’uniforme voir ci-dessous), plus le général de brigade Nguyễn Mạnh Hùng, ex-PDG de Viettel, puissant consortium spécialisé dans les télécommunications, entreprise phare du Département général des industries de défense, qui a été nommé en juillet 2018 ministre de l’information et des télécommunications.

Les militaires élus au Comité central du PCVN en janvier 2021