Après une année 2020 désastreuse sur le plan de la fréquentation de ses ports militaires par des bâtiments étrangers, en raison de la pandémie de COVID-19, il a fallu attendre ce mois de mars 2021 pour voir un pavillon étranger accoster au Viêt Nam, en l’occurrence à Cam Ranh. Un choix sans ambiguïté, aucun autre port ne semblant offrir de meilleures conditions d’accueil d’un équipage étranger avec le risque minimal de contamination par le virus. Le site naturel de la rade, qui accueille les infrastructures de la 4e Région maritime et les fleurons de la marine populaire (les quatre frégates Gepard et les six sous-marins Kilo), a permis le développement d’un « port international » permettant l’accueil des bâtiments étrangers à l’abri des regards et en toute sécurité. Ce site aurait dû accueillir l’an dernier les bâtiments qui étaient attendues à la revue navale internationales qui devait être organisée au large de Nha Trang mais qui, après avoir été dans un premier temps reportée, a fini par être annulée en raison de l’impact du COVID sur les déploiements internationaux. En 2020, le port international de Cam Ranh n’a accueilli qu’une escale – celle d’un groupe naval japonais les 10 et 11 octobre – contre dix en 2019.
Le premier bâtiment à y faire relâche cette année, du 09 au 12 mars, a arboré les couleurs françaises. La frégate de surveillance Prairial (F-731), commandée par le capitaine de frégate Pierre-Louis Josselin, est en effet déployée dans le Pacifique ouest depuis fin janvier. Elle est arrivée en provenance de Sasebo (Japon) où elle avait effectué une escale technique du 20 au 23 février. L’accostage à Cam Ranh, malgré les conditions sanitaires drastiques, était attendu par tout l’équipage, qui bénéficiait pour la première fois depuis son départ de Tahiti d’une période de « régénération » à terre. Un fait exceptionnel qui a été salué tant par l’ambassade de France que par le contre-amiral Rey depuis Papeete.
A cet égard, la communication vietnamienne sur cette escale semble avoir essentiellement consisté en une reprise, par les principaux médias, d’éléments fournis par les autorités françaises locales, et notamment l’attaché de défense. L’on y verra un effet des précautions sanitaires en vigueur dans le pays mais aussi dans les nations visiteuses : isolement du quai, véritable opération de décontamination du personnel lors de son débarquement, absence de comité d’accueil et de conférence de presse sur le quai, les militaires vietnamiens ont visiblement établi un cordon sanitaire étanche, conditionnant le succès de l’escale. Un effort exceptionnel dont l’impact se fera sentir durablement et certainement positivement, le Viêt Nam voulant s’afficher comme un acteur vertueux dans la lutte contre la pandémie – avec des résultats qui ont été salués sur la scène internationale, y compris par l’ambassadeur des Etats-Unis, Dan Kritenbrink, et l’ex-ambassadeur de France Jean-Noël Poirier.
L’escale a donc été médiatisée (11 mars) alors qu’elle touchait à sa fin. Les articles, quasiment tous similaires, ont diffusé quelques clichés pris par la partie française, et repris des précisions données par l’ambassade de France. Fait peu fréquent dans les commentaires des médias vietnamiens, il a été mis en valeur le fait que ce déploiement participe de la volonté de la France de contribuer à la liberté de circulation en mer « de l’Est », un axe fort de la stratégie indo-pacifique du ministère français des armées français. Sans doute faut-il voir dans ce coup de projecteur sur cette mission la reprise d’éléments qui étaient déjà cités par le bureau communication des forces françaises basées à Tahiti, auxquelles le Prairialappartient, mais aussi la volonté des autorités françaises de valoriser, à très juste titre, l’importante présence navale française dans le Pacifique occidental en ce début d’année 2021. Enfin, à défaut de pouvoir mettre en exergue des interactions physiques avec les autorités vietnamiennes, les médias ont largement repris une information reçue de l’attaché de défense et relative à une intervention technique qui devait être menée sur l’hélicoptère embarqué par la frégate (une vénérable Alouette III) (*). Des propos similaires avaient été tenus par l’ambassade de France à Tokyo à propos de l’escale du Prairial à Sasebo, deux semaines auparavant. Des remerciements appuyés ont été publiquement adressés aux autorités militaires vietnamiennes pour avoir facilité l’intervention d’une équipe de techniciens en provenance de France, ce qui dans le contexte sanitaire très sévère est un geste réellement de nature à favoriser la relation bilatérale.
Alors que la frégate a désormais repris la mer et son transit vers la Polynésie française, l’on gardera l’image d’une escale réussie, avec un impact positif sur la relation militaire vietnamo-française, et dont le professionnalisme avec laquelle elle a été organisée renforce le crédit dont jouit déjà le Viêt Nam dans la lutte internationale contre la pandémie de COVID-19. Nul doute que Cam Ranh devrait voir sa fréquentation en hausse en cette année durant laquelle plusieurs nations déploieront des moyens importants en mer de Chine méridionale. La marine française y est d'ores et déjà attendue à nouveau avec l'escale du porte-hélicoptères amphibie Tonnerre et de la frégate légère furtive Surcouf, déployés dans le cadre de la mission Jeanne d'Arc, en mai.
(*) « Với sự giúp đỡ từ phía Việt Nam, chúng tôi đã mời kỹ sư từ Pháp sang Việt Nam để lên tàu chữa máy bay trực thăng trên đó » (« Avec l'aide de la partie vietnamienne, nous avons fait venir des techniciens depuis la France jusqu’au Viêt Nam pour procéder à la réparation de l’hélicoptère embarqué »).
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