Comme chaque année à la période
des vœux, l’heure est aux déclarations d’intentions. Le général d’armée Ngô
Xuân Lịch, ministre de la défense, s’est prêté à une interview de début
d’année (30 janvier 2017), dans laquelle il a défini ses grands axes d’effort en matière notamment
de diplomatie de défense.
Sans surprise, l’ex-commissaire
politique en chef de l’armée populaire a débuté son propos par un
rappel incontournable du lien charnel qui unit l’armée au Parti communiste
vietnamien (PCVN), rassurant les auditeurs sur l’absolue fidélité des
militaires aux directives du Parti et sur l’indissociable relation qui existe entre
développement économique du pays et sa défense. Des propos immuables, qui
apparaissent parfois comme un exercice déclamatoire imposé à tout haut responsable,
militaire comme civil, mais qui rappellent une réalité de la société
vietnamienne – comme de toute nation consciente du fait que l’armée n’est
qu’une émanant de la société.
Dans un second temps, après avoir
rappelé - à juste titre - que le contexte international était de plus en plus complexe, avec de
nombreux foyers de tensions, le ministre a rappelé les missions-clés des forces
armées : repousser tout risque de guerre, défendre l’indépendance,
l’intégrité territoriale et l’unicité de l’ensemble du pays, garantir un environnement
pacifique et stable, propice au développement économique du pays. Dans ce
cadre, il a dégagé trois axes d’effort principaux :
- renforcer la coopération de défense, bilatérale et
multilatérale, avec comme priorité numéro les relations avec les voisins du
Viêt Nam, ses partenaires de l’ASEAN et ses « pays-frères » (Russie,
Cuba) ; en seconde priorité viennent les grandes puissances stratégiques
(occidentales mais aussi asiatiques) ; et enfin les pays que le ministre
qualifie d’Etats « à potentiel ». En ce sens, ces propos confirment le
début de parcours du général Lịch depuis sa prise de fonctions, un parcours
essentiellement tourné vers les partenaires de Hanoi dans la sous-région (même
si le ministre s’est déjà rendu à Moscou et à Pékin).
- s’investir en faveur des mécanismes de coopération de défense
de l’ASEAN et des initiatives de l’APEC en 2017. Des propos logiques, avec
sur l’agenda diplomatique de Hanoi l’organisation du sommet de l’APEC, en
novembre à Đà Nẵng. Dans le même élan, le général Lịch confirme l’engagement de son ministère en faveur des opérations de maintien de la
paix sous l’égide des Nations unies - qui doit toujours se concrétiser par
le déploiement d’un premier contingent de forces (unité médicale ; compagnie
du génie) – et des exercices de renforcement des compétences en matière de secours et d’assistance humanitaire en cas
de catastrophe naturelle. Là aussi, il s'agit d'une tendance lourde qui a été
régulièrement mise en valeur durant les années écoulées.
- enfin, et ce point aura
certainement reçu une attention toute particulière à Pékin, mener, avec les trois voisins directs
du Viêt Nam (Chine, Laos, Cambodge) des
patrouilles conjointes sur la frontière terrestre et en mer, organiser des
échanges sur les conditions d’exécution de cette coopération, et renforcer la
confiance et les relations amicales avec ces pays, autant de décisions que le
général Lịch considère comme capitales pour la protection de l’intégrité
territoriale vietnamienne.
Alors que le ministère de la
défense n’a toujours pas publié de nouveau Livre blanc sur la défense –
pourtant annoncé depuis l’automne 2014 – les propos du général Lịch confirment les grands axes
de la politique de défense vietnamienne et s’inscrivent résolument dans une
volonté d’apaisement des relations avec Pékin, une tendance qui s’est déjà
concrétisée depuis le douzième Congrès national du PCVN, il y a un an.
Nul doute
que le discours du général Lịch aura été bien reçu dans les capitales
de la sous-région, et laissé dans l’incertitude certaines grandes puissances –
occidentales – qui voyaient dans les signaux d’ouverture lancés par le tandem
Phùng Quang Thanh et Đỗ Bá Tỵ (les ex-ministre de la défense et chef d’état-major
général des armées) des opportunités de renforcer leur présence sur les rives
de la mer de Chine méridionale. Des espoirs, notamment américains, dont la
concrétisation ne se discerne pas encore. En revanche, la confirmation de
l’ambition du général Lịch de renforcer les relations du pays avec les
puissances asiatiques obtiendra un écho très favorable à Tokyo et New Delhi,
partenaires déjà très en vue en 2016.
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