Le 16 septembre 2020, depuis Hà Nội, le général de division Thái Đại Ngọc, chef du Département des opérations de l’état-major général des armées vietnamiennes, a présidé la réunion annuelle des "chefs ops" des dix pays de l’ASEAN. Pandémie de COVID-19 oblige, cette réunion a, comme la quasi-totalité de celles que le Viêt Nam espérait accueillir durant sa présidence des instances aséaniennes en 2020, été organisée par vidéoconférence. Seule exception à ce sentiment d’isolement forcé, les organisateurs s’étaient entourés des attachés de défense des Etats membres de l’association régionale, qui partagent au quotidien les mêmes conditions de vie que les Vietnamiens.
Plus que le contenu des discussions, forcément orienté sur les espoirs que les effets de la pandémie s’estompent prochainement afin que les contacts directs puissent reprendre, ce mini-sommet s’est conclu par une transmission symbolique de témoin entre le général Ngọc et l’attaché de défense du sultanat de Brunei accrédité à Hà Nội. Par ce geste, les autorités vietnamiennes lèvent désormais le doute - et reconnaissent la fin des espoirs que certains entretenaient - de voir leur pays conserver une année supplémentaire la présidence de l’ASEAN. Une telle situation, certes exceptionnelle - mais la situation que connaissent tous les pays cette année est exceptionnelle en tous points – n’était pas utopique (voir à cet égard la récente étude d’AVQ) et était même soutenue par des partenaires non aséaniens tels que les Etats-Unis et l’Australie. Certes, ne nous voilons pas la face, ces derniers pouvaient voir dans une telle décision un atout dans leur stratégie « tout sauf Pékin », qui s’est développée sur le terreau de la pandémie de COVID-19 et continue de s’exprimer jusqu’à la tribune (elle aussi virtuelle) de l’assemblée générale des Nations unies.
Le LCL Zainolhizad bin Haji Muhammad Zain, attaché de défense de Brunei, reçoit le témoin de passation de présidence du groupe de travail des chefs OPS de l'ASEAN des mains du GDI Thái Đại Ngọc. |
Les dés sont donc jetés, les passations de leadership entre le Viêt Nam et Brunei ont bel et bien commencé, comme les militaires nous le montrent. Hà Nội n’aura en tout état de cause pas démérité dans sa présidence « virtuelle » de l’Association, mais le poids et le lustre qui devaient entourer les différents sommets de fin d’année manqueront au bilan final du régime qui, alors qu’il est désormais en courte finale de la relève du Comité central du Parti communiste vietnamien et de tous les hauts dirigeants du Parti et donc de l’Etat, ne pourra s’auto-créditer d’un succès total dans sa présidence de l’ASEAN, qui coïncidait avec un siège de membre non-permanent au Conseil de sécurité des Nations unies. Une telle situation, avec un « alignement des planètes » aussi favorable, n’est pas amené à se représenter avant de nombreuses années, ce dont tout le monde (diplomatique) est bien conscient, tant à Hà Nội qu’à Pékin.
Année blanche donc, sans accroc, mais sans jalon mémorable. L’effet COVID-19 restera longtemps dans les annales.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire